Editorial : l’austérité gouvernementale va encore détruire des politiques publiques locales

Publié le 26 janvier 2018

Maintenant que les lois de finances sont effectives, on mesure les contraintes très fortes qui vont peser sur les politiques publiques locales, en mettant en cause insidieusement la décentralisation. Les communes et les intercommunalités vont avoir un encadrement très strict de leurs dépenses de fonctionnement et d’investissement jusqu’en 2022. C’est la loi de programmation des finances publiques 2018-2022 qui le décrit et qui vient d’être validée par le Conseil Constitutionnel (voir article plus loin). De manière beaucoup plus subtile que la politique de Hollande qui avait baissé brutalement les dotations de l’Etat, la politique de Macron arrivera aux mêmes résultats si elle est poursuivie effectivement durant les 5 années à venir, ce sera 13 milliards d’économies en fonctionnement et 13 milliards de baisse des dettes des collectivités locales. L’Etat veut imposer aux collectivités des règles de gestion qu’il ne s’impose pas à lui-même. Tout va se jouer au moment du contrat que le gouvernement va proposer à la Métro et la ville de Grenoble dans les mois qui viennent.

Les collectivités n’auront plus de marges de manœuvres notables et ne pourront plus dégager des ressources nouvelles pour sauvegarder notamment les programmes de logements sociaux qui vont être sacrifiés suite à la loi de finances 2018 qui impose des baisses de loyers très importantes aux bailleurs sociaux pour tous les ménages touchant les APL (voir article plus loin) pour les années 2018 et 2019 et qui va encore s’amplifier en 2020.

Cette baisse de loyer ne sera pas sensible pour le locataire, puisque son APL diminuera à peu près d’autant, ce n’est donc pas une mesure sociale, par contre c’est une baisse très importante des recettes des bailleurs sociaux. Cela va toucher de plein fouet les bailleurs qui logent en priorité les ménages aux ressources les plus faibles et qui interviennent fortement dans les quartiers politique de la ville. Notamment et en première ligne les OPH (Office Public de l’Habitat) comme ACTIS (qui dépendent directement des collectivités) et beaucoup moins les grosses EHS (entreprises sociales pour l’habitat, comme la SDH et la SCIC Habitat) qui sont des sociétés purement privées, qui gèrent environ la moitié des logements sociaux, et ne sont pas contrôlées par les collectivités publiques. Les ESH peuvent diversifier leurs activités contrairement aux OPH et donc résister plus facilement à cette purge financière et ils ont, en général, beaucoup moins de ménages aux faibles ressources que les OPH.

Après avoir bridé l’action des collectivités, la politique d’austérité atteint brutalement les politiques publiques de l’habitat social qui a pourtant grand besoin de réhabilitation et de constructions nouvelles. Beaucoup de bailleurs sociaux qui équilibraient à peu près leurs finances vont devoir arrêter des programmes de construction ou de rénovation car ils n’auront plus de fonds propres à mobiliser pour cela. La rénovation de quartiers comme la Villeneuve ou l’Abbaye va être remise en cause fortement.

Comme l’indiquait le Président de la République, cette politique vise à obliger les bailleurs sociaux à se regrouper dans des grands ensembles qui échapperont de fait au contrôle politique des collectivités locales. C’est un pas de plus vers la recentralisation de l’action publique.

Il est urgent que les collectivités, les bailleurs et les habitants réfléchissent aux moyens de résistance à mettre en place pour que ces politiques destructrices cessent, notamment que les prochaines lois de finances arrêtent ces régressions sociales et que des restructurations intelligentes des bailleurs sociaux liés aux collectivités permettent leur survie tout en gardant le contrôle de leurs activités par les collectivités locales.

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