
Comment les collectivités et les acteurs de l’Economie Sociale et Solidaire (ESS) peuvent-ils agir ensemble pour favoriser une transition écologique juste ? Début 2024, le « Labo de l’ESS » a publié une étude intitulée « Vers une société de la coopération. Accompagner et financer les coopérations territoriales au service de la transition écologique juste« .
Des projets très divers émergent : territoires zéro chômeur de longue durée, territoires zéro précarité alimentaire, pôles territoriaux de coopération économique, tiers-lieux… reposent sur des modèles économiques et juridiques hybrides et complexes qui nécessitent d’être accompagnés et financés.
La transition écologique juste qui est défendue ici, passe par une transformation systémique de la société et des territoires, par la création des écosystèmes coopératifs territoriaux. Ces derniers nécessitent de changer collectivement de posture : être unis pour la transition des territoires, pour défendre ce qui est considéré comme des biens communs.
Voici le début de l’introduction à cette étude :
« Vers une société de la coopération : une perspective de transition.
En étendant sans cesse la sphère du marché, le capitalisme nous positionne tou·te·s dans une société de concurrence. Son évolution récente vers un modèle néolibéral a poussé à l’extrême l’idée que le bien commun surgirait de la compétition entre des individus ou des entreprises atomisés, poursuivant leur intérêt propre. Faisant de ce principe sa boussole politique, il a peu à peu imposé la dérégulation économique et réduit le pouvoir des États.
Mais, en fait de bien commun, ce modèle de société est à la fois la cause du maintien de fortes inégalités et de la dégradation alarmante des conditions d’habitabilité de notre planète. Désencastrée des sphères sociales et politiques, qu’elle soumet à sa logique, notre économie mondialisée poursuit une course effrénée à la production et à la consommation. Ces dernières sont de plus en plus déconnectées des besoins fondamentaux, pourtant très loin d’être couverts de façon digne et suffisante : l’économie de profusion est dans le même temps une économie où subsiste et même s’aggrave la précarité (alimentaire, énergétique, de mobilité, etc.), où l’accès aux soins est compromis pour beaucoup, alors que nos modes de vie développent entre autres de nouveaux risques sanitaires. Sous couvert d’une promesse d’abondance pour tou·te·s, cette économie favorise une inégale répartition des richesses, toujours plus concentrées et synonymes de pouvoir. Dans le même temps, ses conséquences désastreuses pour notre environnement sont désormais bien connues : augmentation des émissions de gaz à effet de serre et pollutions des milieux (air, sols, eau), effondrement de la biodiversité, augmentation des aléas climatiques (sècheresses, inondations, feux de forêts), etc.
Ces crises sociales et environnementales renforcent à leur tour l’essoufflement de notre système politique, en accentuant les antagonismes entre différents groupes sociaux et en contribuant à la fragilisation des processus démocratiques de décision. Le discours néolibéral renvoie les individus à leur responsabilité personnelle – en tant que consommateur·rice·s et épargnant·e·s ou en tant que (non) travailleurs – éludant le caractère éminemment politique et collectif de la résolution de ces questions. Ce faisant, il confie à nouveau aux marchés, à la bonne volonté des entrepreneurs, des consommateurs·rice·s et à l’innovation technologique le soin de résoudre ces problèmes, sans remise à plat des principes qui ont très largement conduit à leur avènement. La prise en compte des crises écologiques et sociales, loin d’appeler une transformation radicale de notre rapport à l’économie, serait une « critique à internaliser », comme d’autres auparavant – voire une opportunité pour dégager de nouveaux champs d’extension de la sphère marchande et de la mise en profits.
Il faut que tout change pour que rien ne change.
Il devient urgent de rompre avec ce modèle qui non seulement favorise les inégalités et la destruction du vivant, mais empêche et amoindrit aujourd’hui toutes initiatives visant à faire émerger une contre-proposition. À cette société de compétition, nous opposons donc une alternative claire : une société de coopération… »
Mots-clefs : économie, social, solidarité