Rocade Nord : la Métro veut continuer, et même payer !

Publié le 30 mai 2010

nitunnelniviaducLe conseil de la Métro du 28 mai a adopté une délibération qui demande clairement au Conseil général de reprendre les études d’une rocade-nord, et en lui proposant généreusement de copiloter les études et donc de les payer moitié-moitié (dixit le Président). Voir ci-dessous le texte des décisions prises.

Voici quelques points forts du débat qui a précédé le vote de cette délibération (63 pour, 6 contre et 4 abstentions). A noter que les représentants de La Tronche (UMP) ont voté pour, par contre ceux de Saint Martin le Vinoux ont voté contre, comme un élu du Parti de Gauche (Semanaz) et deux élus de la majorité municipale (Vuaillat et Grasset) ; et évidemment G. Kuntz, représentant les dizaines de milliers d’électeurs écologistes de l’agglomération.

Gilles Kuntz a présenté les points forts d’un programme pour améliorer les déplacements et l’accessibilité de l’agglomération sans rocade, en effet la question des déplacements périurbains doit être traitée en priorité.

M. Baïetto a répondu qu’une solution sans rocade entrainerait automatiquement une hausse d’impôts par le raisonnement suivant : les transports en commun (TC) de l’agglomération sont financés par l’usager à hauteur de seulement 17 % et par 83 % par de l’argent public, donc les contribuables. Or ceci est totalement et grossièrement faux. Le SMTC reçoit en effet de l’argent public (65 M€) provenant de la Métro et du Conseil général, mais aussi de l’argent « privé » (80 M€) provenant du Versement Transport (1,8 % de la masse salariale des entreprises de plus de 9 salariés, donc de l’argent des salariés). C’est avec cet argent, en majorité privé, qu’il finance les investissements en TC et la SEMITAG. Donc s’y on ajoute ce que rapporte les usagers des TC en payant leur billets TAG (28 M€), toute personne normalement constituée pourra facilement voir que l’argent public est minoritaire dans le financement des TC.

Autre intervention curieuse du Président de la Métro (qui est aussi président du Schéma de cohérence territoriale – SCOT) : la priorité doit être donnée aux déplacements internes à l’agglomération, et non au périurbain, car ils sont prépondérants. Or le nombre de kilomètres parcourus par les automobiles sont les suivants dans une journée (simulations EGIS pour le Conseil général en 2014) : 21,7 millions pour la Région urbaine (RUG) et seulement 7,8 millions pour l’agglomération soit 13,9 millions pour les déplacements dans la RUG hors agglomération. Si on diminue fortement les arrivées des véhicules périurbains (en transférant notamment dans les TER), on diminuera d’autant le trafic interne à l’agglomération. Le Schéma directeur d’aménagement et d’urbanisme – SDAU valant SCOT insiste sur la nécessité de traiter en priorité les déplacements périurbains, le Président du SCOT devrait le rappeler au président de la Métro !

Le Président de la Métro justifiait son amendement pour associer la Métro aux études par le fait que le Conseil général n’avait pas écouté les communes, ni la Métro pour élaborer son projet de rocade. Ceci est savoureux quand on sait que celui qui s’occupait de ce dossier au CGI était M. Baïetto !

Un représentant de GO (J.Ph. Motte) a beaucoup insisté sur la nécessité pour la Métro de conduire les études avec le Conseil général, avec pour conséquence logique pour la Métro de prendre la co-maîtrise d’ouvrage de la rocade. La conséquence automatique sera alors d’assumer une partie de l’investissement de la rocade et donc augmenter les impôts de la Métro.

Enfin, le maire de Grenoble a asséné sans les démontrer un certain nombre d’affirmations qui demanderaient à être débattues. Par exemple le fait que l’accessibilité de l’agglomération soit limitée à 3 vallées et non à une multitude d’entrées est un handicap par rapport à d’autres agglomérations. Or il est beaucoup plus facile de faire basculer les automobilistes périurbains vers les TER dans la configuration grenobloise, puisque les voies ferrées existent, il suffit alors d’augmenter la capacité de transport des TER aux heures de pointes et multiplier les parkings relais près des gares.

Dans la presse, M. Baïetto annonce un retard de 3 ans pour une « rocade nouvelle ». Il serait pourtant temps de s’atteler aux vrais problèmes que sont les déplacements des périurbains (voir l’avis donné par l’ADES à la commission d’enquête), et d’arrêter définitivement avec cette rocade qui sert à justifier l’attentisme actuel sur les solutions efficaces à adopter.

Enfin, cette délibération de la Métro ne parvient cependant pas à masquer des contradictions insurmontables : la Métro demande à la fois au CGI d’améliorer l’accessibilité de l’agglomération, tout en proposant une rocade qui, comme le montre toutes les études, détériorera cette accessibilité !

La délibération du 28 mai de La Métro

« Le conseil de communauté décide :

– de prendre acte de l’avis défavorable de la commission d’enquête publique relative au projet de rocade nord,

– de rappeler la nécessité d’améliorer l’accessibilité de l’agglomération grenobloise et de demander au Conseil général de l’Isère de conduire les études permettant de régler les difficultés d’accès et de circulation dans l’agglomération grenobloise, notamment au nord de celle-ci, en prenant en compte les observations de la commission d’enquête, et en veillant à un haut niveau d’insertion visuelle, phonique, et environnementale. Il conviendra de limiter l’impact, sur la santé des populations concernées, de la pollution générale engendrée par l’ensemble des ouvrages notamment sur les sections à proximité des populations,

– de réaffirmer la nécessité d’un aménagement de l’A480 pour un trafic apaisé et la modification de l’échangeur du Rondeau dont les financements de l’Etat sont acquis,

– de lancer, dès maintenant, un travail approfondi sur cette accessibilité, en incluant les conclusions des études réalisées par La Métro sur les secteurs portes, en veillant à mailler les polarités mais également les grands projets d’aménagement du territoire métropolitain, en matière d’économie ou de logements. Ce travail devra se concentrer sur les six prochains mois, en partenariat avec les collectivités territoriales, communes et Conseil général, et produire des propositions fortes, dont la mise en oeuvre est possible à court et moyen terme, compatibles avec les objectifs de développement durable affirmés par l’agglomération grenobloise,

– d’affirmer l’importance de la recomposition urbaine qui sera possible au coeur de l’agglomération et dans les centres extérieurs grâce au concept multimodal de déplacements, permettant de dégager les espaces publics avec une meilleure irrigation par les transports en commun (y compris le transport par câble) et des modes doux (vélo et marche à pied),

– d’être associé aux études que le Conseil général de l’Isère devra poursuivre sur le contournement nord pour proposer un nouveau projet de rocade et pour améliorer l’accès et la circulation dans l’agglomération grenobloise en articulation avec les études du PDU, conduites par le SMTC pendant la période 2010-2012 dans un dialogue permanent avec les acteurs locaux porteurs de projet en particulier les communes directement impactées. »

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3 commentaires sur “Rocade Nord : la Métro veut continuer, et même payer !”

  1. Morard-Lacroix dit :

    Dans le débat qui commence sur le nouveau réseau de transport à Paris se pose clairement la question de l’organisation économique et sociale de la région urbaine parisienne. La concentration des emplois est tant à Paris qu’à Grenoble la source du problème de saturation des réseaux : il y a 280 000 emplois dans la Region urbaine (sur 277 communes , le Scot) dont 200 000 dans l’agglomération, cad 70% des emplois.

    Cette concentration économique et urbaine du territoire va vers la densification, le renchérissement du logement, la saturation des transports et l’inégalité des territoires, les politiques pour lutter contre les forces centrifuges sont de plus en plus difficiles.. Pour s’en sortir, il ne s’agit pas de gérer des déplacements mais de rééquilibrer le développement des territoires (projets économiques, pôles urbains confortés,..).

    Une piste est d’organiser ensemble la distance entre les pôles urbains pour mailler le territoire. La question est globale pour les habitants de chaque secteur de tout le territoire (quelle centralité, quels services publiques, quels emplois..). Notre qualité de vie demain dépendra de l’ouverture du débat sur le SCOT, il y faut une vue à 380° des problèmes du territoire. Le PDU et le PPA seraient cet été réorganisés a cette échelle. Les choix dans l’organisation même des transports prévus structureront tout le territoire pour 30 ans et plus.

    Le débat engagé a Paris est intéressant. La double boucle dépassait les moyens de la région mais semble mieux permettre de consolider les polarités du territoire par un fonctionnement en réseau entre pôles.

    Les TER mais quels TER demain ?

  2. Marmottant dit :

    D’accord avec le commentaire de Morard-Lacroix : il faudrait cesser de vouloir déplacer tout et tout le monde à tout prix, il vaudrait mieux relocaliser l’économie (l’agriculture, les services, et dans la mesure du possible l’industrie – artisanat). Cela améliorerait beaucoup plus efficacement les problèmes de l’emploi, des transports, de rejets de CO2 et autres pollutions environnementale, ainsi que la qualité de vie à tous points de vue (dont l’équilibre entre temps privé et temps professionnel).

    Sonia.

  3. […] a demandé à la Métro et à la Ville de Grenoble quelles étaient leur position sur ce dossier. Le 28 mai dernier, la Métro, faisant suite à des pressions du lobby automobile relayé par la droite au conseil communautaire, […]