Vœu à la métropole sur le compteur Linky

Publié le 8 avril 2016

LinkyLe 1er avril le Conseil de la métropole a adopté un vœu sur le déploiement des compteurs Linky prenant en compte les réponses d’ERDF à certaines questions. Rappelons que sur l’agglomération il y a deux autorités organisatrices de la distribution de l’électricité : la métropole et le SEDI (Syndicat des Energies du Département de l’Isère) qui sont les propriétaires des compteurs électriques installés par les concessionnaires distributeurs qui sont ERDF pour la plupart des communes de la Métro et GEG pour Grenoble. Actuellement GEG n’a pas choisi le type de compteur communicant qui sera installé sur le territoire de Grenoble. La Métro devra choisir le compteur qui sera installé à Séchilienne, dont la distribution est en régie.

L’installation des compteurs communicants est imposée par la loi au concessionnaire ; certaines caractéristiques sont imposées mais le concessionnaire a une liberté dans le choix du modèle à installer. ERDF a fait le choix du compteur Linky.

Ce type de compteur présente des avantages pour le pilotage du réseau électrique dans une perspective de forte pénétration des énergies renouvelables qui impose de piloter la consommation en fonction de la production. Il permettra aux fournisseurs d’électricité d’adapter les tarifs de manière très sélective et pour l’usager de contrôler de manière plus fine sa consommation. De plus, il dispensera les fournisseurs des contraintes de relevés sur site, très onéreuses, ainsi que des estimations, qui sont sources d’erreurs et complication de facturation.

Par contre il présente des inconvénients, et des interrogations. Des usagers s’inquiètent fortement devant cette installation et demandent aux autorités organisatrices de refuser l’implantation du compteur Linky.

Il y a essentiellement trois causes d’inquiétudes : le risque pour la santé par l’ajout d’une pollution électromagnétique, l’atteinte aux libertés individuelles, une hausse des tarifs.

La pollution électromagnétique due au fonctionnement du compteur lui-même est très faible.

Ce qui inquiète le plus les usagers, c’est la pollution due aux courants porteurs en ligne (CPL). Le CPL c’est la transmission de données à travers les câbles électriques, sur une onde de fréquence courte non utilisée pour le transport de l’électricité avec un effet induit : l’installation électrique, c’est-à-dire les câbles du réseau et ceux du logement transmettent alors les données dans le câble et se transforment en même temps en « antenne ».

Cette pollution est très basse et inférieure aux seuils reconnus comme inoffensifs des 0,6 V/m en moyenne (de plus la fréquence des signaux est faible 70 KHz). Les transferts de données par CPL sont effectués pendant quelques minutes par jour, entre minuit et 6h du matin selon ERDF. Ce sont les concentrateurs des données qui reçoivent les données des compteurs installés dans un proche voisinage qui transmettent ces données par GSM au distributeur qui apporteront une pollution électromagnétique dans le voisinage équivalente à celle d’une antenne de téléphonie mobile émettant quelques minutes par jour, c’est-à-dire peu polluante. Il aurait été astucieux de prévoir un modèle de compteur qui puisse transmettre des données d’autres compteurs comme ceux du gaz, de l’eau ou du chauffage urbain, ce que ne peut pas faire le Linky.

L’atteinte aux libertés individuelles est beaucoup plus préoccupante. Ce type de compteur peut suivre et mettre en mémoire la courbe de charge (ou de consommation) d’un ménage. S’il n’y a pas une protection suffisante il y a un risque « d’espionnage » sur la vie quotidienne des occupants du logement à leur insu. En théorie, le gestionnaire de réseau doit demander l’autorisation à l’usager pour utiliser et mémoriser la courbe de charge.

Rappel de la recommandation de la CNIL : « la CNIL est particulièrement vigilante s’agissant de la collecte de la courbe de charge, car une analyse approfondie de cette courbe permet de déduire de nombreuses informations relatives à la vie privée des abonnés (heures de lever et de coucher, périodes d’absence, éventuellement nombre de personnes présentes dans le logement). Aussi, dans sa recommandation du 15 novembre 2012, elle a encadré les conditions de collecte de la courbe de charge, notamment en la subordonnant au consentement exprès des personnes concernées pour la mise en place de services d’optimisation énergétique. »

Il faudrait s’assurer que la saisie des données ne puisse pas être effectuée à l’insu de l’usager.

Il faut également vérifier, comme l’affirme ERDF, que les données transmises sont protégées efficacement contre toute tentative de piratage afin que ces informations restent confidentielles.

Les autorités organisatrices (Métro et Sedi) devraient s’adresser aux agences administratives pour savoir quelles sont les mesures qui sont prises pour éviter les agressions à la santé et aux libertés individuelles : Agence Nationale des Fréquences (ANFR) et l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire) pour l’impact des rayonnements sur la santé. L’ANSSI (Agence Nationale de la Sécurité des Systèmes d’Information) pour le cryptage des données, la CNIL pour les protections à mettre en place…

L’évolution tarifaire est également un risque important pointé par les associations de consommateurs.

Officiellement, le compteur Linky permettra à l’usager de faire des économies d’énergie grâce à l’accès en temps réel à ses données de consommations électriques. Or, pour la moitié des usagers, le compteur n’est pas situé dans le logement. Il faudrait alors que les données soient déportées vers le logement ce qui n’est pas prévu (sauf à payer) et il faudrait que la consommation soit affichée en kWh et en euros, car les fournisseurs vont faire des tarifs différents suivant les moments de consommation (ils pourront créer jusqu’à 10 tarifs différents !). L’UFC Que Choisir déclare : « L’énorme problème, c’est que Linky n’apporte rien, strictement rien aux usagers. Il risque même d’alourdir leurs factures sans contrepartie ! ».

Par contre, cette base de données des consommations en temps réel, représente une manne pour les fournisseurs qui vont pouvoir adapter leur politique tarifaire au pic de consommation. Il y a fort à parier que leur but ne sera pas d’alléger la facture de leurs clients mais bien d’augmenter leurs recettes en instaurant une politique tarifaire basée sur la demande, (exemple : transports aériens et ferroviaire, stationnement en ouvrage), qui signifie une hausse du tarif moyen.

Les données de consommation vont également permettre de détecter en temps réel tout dépassement de puissance consommée des ménages par rapport à leur abonnement. Contrairement aux compteurs actuels, le compteur Linky intègre un interrupteur. La puissance de coupure sera donc toujours calée à la puissance souscrite contractuellement ce qui entrainera plus de coupures qu’actuellement et obligera certains usagers à augmenter la puissance contractuelle. Pour les consommateurs qui modifieraient leur abonnement suite à la pose d’un compteur Linky, la Commission de Régulation de l’Energie (CRE) a demandé que la prestation de changement de puissance soit réalisée gratuitement par ERDF.

Point positif, il sera dorénavant possible d’ajuster plus finement la puissance souscrite à la réalité de sa consommation. Aujourd’hui, on ne peut régler son disjoncteur que par palier de puissance de 3 kVA. Le compteur Linky permettra des paliers par pas de 1 kVA. Il reste à espérer que ces nouveaux tarifs intermédiaires soient proportionnels.

Il y a enfin la facture globale du déploiement du compteur, qui dépassera les 5 milliards d’euros. L’installation est gratuite pour l’usager et selon ERDF, ce sont les économies de fonctionnement engendrées par ce nouveau compteur qui financeront cet investissement Le coût sera amorti sur la durée de vie des compteurs, c’est-à-dire sur 20 ans et sera intégré dans la partie « tarif d’utilisation des réseaux d’électricité » de la facture des usagers. Au final c’est le client qui payera.

Dans le vœu voté à l’unanimité à la Métro le 1er avril, il est indiqué :

« le Conseil métropolitain de Grenoble-Alpes Métropole prend acte des engagements suivants d’ERDF, confirmés au cours de nombreux échanges intervenus récemment à ce propos, et sera vigilant quant à leur respect :

  • l’absence de coupure d’électricité pour impayés pratiquée automatiquement et à distance par le biais du compteur « Linky » ;
  • un accès facilité pour les usagers à une information détaillée en préalable à l’installation du compteur « Linky » ;
  • l’innocuité de la technologie des courants porteurs en ligne employée par le compteur « Linky » ;l’assurance que toutes les dispositions sont prises pour assurer la sécurité des personnes et des biens, lors de l’installation du compteur « Linky » comme, par la suite, lors de son fonctionnement ;
  • le maintien de l’emploi, notamment local, au terme du déploiement des compteurs « Linky » ;
  • l’absence d’augmentation du montant des factures d’électricité des usagers en lien avec l’installation du compteur « Linky » ;
  • la confidentialité des données recueillies par le compteur « Linky » et leur protection contre d’éventuelles malveillances ;
  • l’information des usagers sur de potentiels dysfonctionnement de certains appareils électriques suite à l’installation du compteur « Linky ».

Il est souhaitable que la Métro et le SEDI demandent à ERDF de corriger au mieux ces graves insuffisances et qu’à Grenoble soit choisi un type de compteur plus adapté à la transition énergétique.

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