L’association « Pour les Chambaran Sans Center Parcs » fait le point sur la situation suite aux arrêts de la Cour d’Appel de Lyon du 16 décembre 2016 qui annulaient les arrêtés du préfet de l’Isère relatifs à la loi sur l’eau et à l’assainissement du Center Parcs. Par contre la Cour d’appel n’a pas annulé l’arrêté préfectoral du 16 octobre 2014 autorisant la destruction et le déplacement des espèces protégées, malgré la position du rapporteur public
A propos de cette dernière décision l’association entend déposer une requête au Parlement européen estimant que la législation européenne a été enfreinte. Cette requête sera examinée par la commission des pétitions du Parlement européen, qui statue sur leur recevabilité et est chargée de leur traitement. Si la Commission constate que la législation de l’Union a été enfreinte, elle peut introduire une procédure d’infraction, laquelle peut aboutir à un jugement de la Cour de justice.
Voici l’argumentation de l’association à ce sujet :
« Si les juges ont suivi, parfois partiellement, les conclusions du rapporteur public sur les deux premiers dossiers (loi sur l’eau et assainissement), ils s’en sont en revanche écartés pour le recours que PCSCP avait déposé, avec la FRAPNA, au titre des espèces protégées. Il est intéressant, à cet égard, de revenir sur l’analyse et les conclusions du rapporteur public, Marc Clément, adressées aux juges de la Cour d’appel de Lyon.
En effet, le point central du débat porte sur la raison « impérative d’intérêt public majeur », définie dans la directive européenne CE 92/43 du 21 mai 1992 concernant la conservation des habitats naturels et de la faune et de la flore sauvages. Cette notion est bien prévue à l’article 6 de la directive, mais sa définition laisse place à interprétation, dans la mesure où sont prévues des raisons « de nature sociale ou économique », sous réserve de mesures compensatoires prises par l’État membre. Les conditions sont plus restrictives « lorsque le site concerné abrite un type d’habitat naturel et/ou une espèce prioritaires », ce qui est le cas pour Roybon.
Or, selon le rapporteur public, « la jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) nous semble systématiquement associer la possibilité de dérogation à la démonstration précise de l’absence de solution alternative qui seule peut conduire à retenir le caractère impératif majeur à un projet ». Il poursuit : « l’analyse des alternatives nous semble défaillante, et (…) rien n’est précisé sur la nécessité impérative d’un projet de cette taille » . La conclusion est sans appel : « le développement économique est assurément nécessaire, mais le texte même de l’article L 411-2 (du code de l’environnement ndlr) ne nous semble pas une simple mise en balance entre l’intérêt économique et les intérêts environnementaux (…). Nous restons dans un régime de dérogation à une interdiction stricte ».
Ce sont donc bien les seuls enjeux économiques autour du projet et les promesses d’emploi associées qui ont fait pencher la balance du côté de l’aménageur, au détriment des espaces et ressources naturels. C’est le choix du court terme qui est fait ici, au détriment d’une vision à plus long terme associant les acteurs locaux de la société civile et les porteurs de projets réellement innovants.
Le juge d’appel avait la possibilité, dans cette affaire, de consolider une jurisprudence nationale (et européenne) encore chancelantes, en démontrant que les solutions alternatives à ce projet avaient été trop rapidement écartées, et que la nature et la taille de cette opération, qualifiée d’ « équipement touristique », cachait en réalité une opération immobilière de grande ampleur (1000 « cottages ») dont l’unique bénéficiaire est un groupe privé dépendant des aides publiques, estimées au total à 112 M€ hors bradage du terrain par la commune de Roybon. Peut-on sérieusement trouver un « intérêt public majeur » au projet d’un groupe privé proposant des formules d’investissement immobilier1 et un type de loisir labellisé et sans ancrage local ?
« L’environnement, ça commence à bien faire » avait déclaré, en son temps, un président de la république. On a ici une démonstration de passage en force, à défaut d’une argumentation plus solide. La raison impérative d’intérêt public majeur, ce serait véritablement le maintien en l’état d’un site remarquable pour toute une région, pour les générations futures. C’est donc, à bon droit que nous présenterons, dans les mois qui viennent, une requête auprès de la commission des pétitions de l’Union Européenne. »
L’association analyse aussi la très mauvaise santé financière du groupe Pierre et vacances – Center parcs :
« Côté en bourse, le groupe doit rendre ses comptes publics. A leur lecture, force est de constater que si les soutiens au projet de Roybon avaient pris connaissance de ces informations, ils détaleraient à toute allure. Pourquoi ? Depuis maintenant 5 ans, le groupe présente un résultat net d’exercice négatif. Le total des pertes durant cette période s’élève à 117 millions d’euros… »
L’association signale que l’UFC-Que choisir vient de sortir un article analysant dans le détail comment fonctionne économiquement ce système de résidences de vacances et les mauvaises surprises imposées aux propriétaires avec parfois des diminutions de 75 % des loyers, suite aux difficultés de « Pierre et vacances ».
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Mots-clefs : Center Parcs, économie, environnement