Le préfet attaque le dispositif d’interpellation et de votation citoyenne de Grenoble

Publié le 21 avril 2017

Le 21 mars le préfet de l’Isère a déposé un déféré auprès du tribunal administratif pour faire annuler le dispositif d’interpellation et de votation citoyenne mis en place par la majorité municipale. Les points contestés sont classiques et le droit est malheureusement très restrictif sur ces questions. C’est pourquoi, pour éviter un choc frontal, le conseil municipal n’a pas délibéré sur le dispositif, il s’agit seulement d’un dispositif non règlementaire proposé par la majorité aux habitants.

Mais les actes sont là et le préfet entend faire respecter la loi. La majorité estime qu’il existe une citoyenneté locale qui ne se limite pas aux électeurs inscrits sur les listes électorales, notamment les étrangers résidents non européens, qui ont les mêmes devoirs (ils payent les mêmes impôts locaux et suivent les mêmes règles) que les électeurs, mais pas les mêmes droits. Et les enfants de 16 à 18 ans qui sont des usagers de nombreux services publics et ont leurs mots à dire sur leur gestion et leur qualité. C’est pourquoi la majorité ouvre les consultations et interpellations aux Grenoblois de plus de 16 ans quelle que soit leur nationalité.

Le préfet demande au tribunal de sanctionner le dispositif grenoblois.

Le dispositif proposé par la majorité et utilisé par des Grenoblois a deux volets, le premier qui est l’interpellation du conseil municipal suite à une pétition de plus de 2000 signatures et le deuxième celui de la votation citoyenne qui vise à faire évoluer une décision du Conseil municipal contestée par plus de 20 000 Grenoblois.

Rappel de ce que dit la loi :

L’article 72-1 de la Constitution précise : « La loi fixe les conditions dans lesquelles les électeurs de chaque collectivité territoriale peuvent, par l’exercice du droit de pétition, demander l’inscription à l’ordre du jour de l’assemblée délibérante de cette collectivité d’une question relevant de sa compétence. » Les électeurs peuvent seulement demander mais non imposer l’inscription et malheureusement la loi n’a jamais été prise pour les collectivités de la métropole. Le législateur s’est arrêté au milieu du gué.

Sur un point particulier la loi ouvre cette possibilité : les citoyens ont le droit de demander l’inscription d’un point à l’ordre du jour du CM, pour qu’il y ait une consultation des électeurs sur la question qui les intéressent. Les électeurs peuvent seulement le demander mais pas l’imposer, le Conseil municipal reste toujours souverain. C’est prévu à l’article L 1112-16 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) : « Dans une commune, un cinquième des électeurs inscrits sur les listes électorales et, dans les autres collectivités territoriales, un dixième des électeurs, peuvent demander à ce que soit inscrite à l’ordre du jour de l’assemblée délibérante de la collectivité l’organisation d’une consultation sur toute affaire relevant de la décision de cette assemblée. »

Seuls les électeurs inscrits sur les listes électorales peuvent pétitionner à ce sujet et doivent être au moins un cinquième des électeurs inscrits à le faire (environ 17 500 électeurs pour Grenoble). Et si par hypothèse le Conseil acceptait d’organiser la consultation, cette dernière ne s’adresserait qu’aux électeurs et ne serait que consultative (article L 1112-17 du CGCT).

Seul le référendum local prévu par la loi peut être décisionnel et seuls les électeurs inscrits sur la liste électorale peuvent y participer. Le maire, seul, peut proposer au Conseil municipal d’organiser un référendum sur « tout projet d’acte relevant des attributions qu’il exerce au nom de la collectivité » (LO 1112-2 CGCT)

« Le projet soumis à référendum local est adopté si la moitié au moins des électeurs inscrits a pris part au scrutin et s’il réunit la majorité des suffrages exprimés. » (LO 1112-7 CGCT). A Grenoble il faut donc environ 43 600 électeurs qui se déplacent, soit environ la participation pour les élections municipales.

La loi verrouille complètement les petites ouvertures vers une démocratie où l’habitant pourrait intervenir plus directement dans des processus de décision.

Suivant ce que dira le tribunal, il faudra adapter le dispositif pour que les habitants puissent continuer à intervenir dans la décision publique.

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