Une étude sur l’éventuelle suppression de la taxe d’habitation pour de nombreux ménages

Publié le 7 juillet 2017

Il s’agit d’une des dispositions phare proposée par le Président de la République pendant la campagne électorale. Il semble que cette réforme soit décalée dans le temps suite au discours de politique générale du premier ministre et qu’elle sera mise à la concertation. L’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) est un organisme indépendant de prévision, de recherche et d’évaluation des politiques publiques. Le 26 juin 2017, il publie une note sur l’évaluation de la réforme de la taxe d’habitation proposée par E. Macron.

Les chercheurs de l’OFCE arrivent à la conclusion que le chiffre annoncé de 80 % de ménages exonérés serait à peu près atteint, pour eux ce serait plutôt 74 %.

Tous les ménages qui auraient (après redistribution) par unité de consommation un niveau de vie inférieur à la médiane du niveau de vie national (1700 €/mois) seraient totalement exonérés et au-dessus de ce niveau la proportion des ménages exonérés diminuerait lentement :

« Ainsi, après réforme, l’ensemble des ménages ayant un niveau de vie après redistribution inférieur à la médiane (1700 €/mois/uc) ne paieraient plus de taxe d’habitation. Pour les ménages appartenant aux 6e, 7e et 8e déciles de niveau de vie, la part des ménages exonérés de taxe d’habitation, inférieure à 3 % avant réforme, devrait s’établir à un niveau supérieur à 50 %. Au total, sur les 16,6 millions de ménages qui devraient bénéficier de la réforme, 11,4 millions (70 %) ont un niveau de vie compris entre le 3e (14 820 €/uc/ an) et le 7e décile (23 840 €/uc/an). »

Voici l’introduction de cette étude :

« Dans le cadre de la campagne présidentielle, Emmanuel Macron a inscrit dans son programme l’exonération totale de la taxe d’habitation pour 80 % des ménages français pour un coût total estimé à 10 milliards d’euros. La taxe d’habitation, qui représente environ un tiers des recettes fiscales des municipalités, pèse pour 1,4 % du revenu disponible des ménages. Si à l’heure actuelle, seuls 15,5 % des ménages n’acquittent aucune taxe d’habitation du fait de l’existence de conditions d’exonération et d’abattements, la mesure proposée par Emmanuel Macron devrait constituer un gain de pouvoir d’achat pour les ménages correspondant à 0,7 % de leur revenu. La mesure cible particulièrement les classes moyennes. En effet, les ménages ayant un niveau de vie compris entre les 4e et 8e déciles devraient bénéficier d’un gain moyen compris entre 410 et 520 euros par an et par ménage, soit près de 4 à 5 fois plus que les gains moyens enregistrés par les ménages des premiers et derniers déciles de niveau de vie. À ces impacts différenciés en termes de niveaux de vie devraient également s’ajouter des différences territoriales sur les gains issus de la réforme. Ainsi, si dans 60 % des départements métropolitains les ménages enregistrent avec la réforme un gain moyen compris entre 279 euros et 356 euros, dans certains départements, n’ayant pas une part élevée de bénéficiaires, les ménages devraient connaître une augmentation significative de leur pouvoir d’achat, supérieure à 356 euros. Au final, si la mesure doit bénéficier à l’ensemble des départements, se pose la question de savoir quelles seront les modalités d’application de cette exonération dans le temps si certaines municipalités augmentent ou diminuent les taux d’imposition pour le calcul de la taxe d’habitation. »

Et la conclusion :

« En ayant pour objectif de redistribuer du pouvoir d’achat aux ménages par la réduction de la taxe d’habitation, la mesure proposée dans le programme d’Emmanuel Macron s’inscrit dans la même logique que celle de Lionel Jospin en 2000 mais avec une envergure bien supérieure. Elle cible tout particulièrement les classes moyennes qui sont les principales bénéficiaires de la mesure, ainsi que les territoires où les montants de taxe d’habitation par ménage sont élevés et ceux ayant une part de la population éligible importante en raison de revenus concentrés autour du niveau de vie médian dans la limite de 20 000 euros. Par ailleurs, se posera la question de l’évolution dans le temps des compensations de l’État vers les municipalités et de l’indépendance des municipalités dans la gestion locale. Si les compensations de l’État se fondent sur la fiscalité locale telle qu’elle existe aujourd’hui, elles intégreront de fait les fortes différences de taux de taxe d’habitation selon les municipalités. Ainsi, en cas de gel dans le marbre de ces compensations, le transfert opéré par l’État risque de pénaliser les municipalités ayant fait par le passé des efforts budgétaires pour réduire les taux locaux (et favoriser les autres). Ainsi, se pose la question de savoir quelles seront les modalités d’application de cette exonération dans le temps si certaines municipalités augmentent ou diminuent les taux d’imposition pour le calcul de la taxe d’habitation. Enfin, pour les ménages, le risque d’effet de seuil est important si l’exonération de taxe d’habitation se fait uniquement en-dessous d’un certain montant de revenu fiscal sans barème progressif »

Pour télécharger l’étude, cliquez ici.

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