Dernier rapport du GIEC, on fonce dans le mur en accélérant !

Publié le 8 avril 2022

Le 4 avril 2022, après de longs débats, les experts du Giec ont publié le troisième volet de leur 6ème rapport d’évaluation, un texte très alarmant sur l’urgence des mesures à prendre. Il reste seulement trois ans pour essayer d’atteindre l’objectif de limitation du réchauffement global à 1,5 °C (accord de Paris).

Ce n’est pas le chemin qui est pris. Si une diminution des émissions de GES a été constatée en 2020, elle a été due aux confinements et à la baisse drastique de l’activité suite à l’épidémie de covid-19. Mais l’activité est repartie à la hausse avec un record historique d’émissions atteint en 2021. La plupart des pays, et en particulier les plus riches, ne respectent pas leurs engagements. Seulement 18 ont réellement et durablement diminué leurs émissions. 

Le Giec appelle donc encore une fois à une réduction rapide, profonde et immédiate des émissions de GES, dans tous les domaines les plus émetteurs, à savoir l’industrie, l’énergie, les transports, l’agriculture et le bâtiment. Le Giec insiste sur la possibilité des individus à agir, à leur échelle, en réduisant leur usage de la voiture ou de l’avion ou en adoptant une alimentation moins riche en viande, l’élevage étant une source importante d’émissions de gaz à effet de serre. 

Extraits du communiqué de presse du Giec du 4 avril 2022 :

« C’est établi : nous pouvons réduire de moitié les émissions d’ici à 2030, mais il faut agir aujourd’hui. Durant la période 2010-2019, les émissions mondiales annuelles moyennes de gaz à effet de serre étaient à leur plus haut niveau de l’histoire de l’humanité, mais leur rythme d’augmentation a ralenti. Sans une réduction immédiate et radicale des émissions dans tous les secteurs, il nous sera impossible de limiter le réchauffement planétaire à 1,5 °C. Toutefois, selon les scientifiques qui ont rédigé le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), publié aujourd’hui, la portée de l’action climatique devient de plus en plus tangible.

Depuis 2010, les coûts de l’énergie solaire, de l’énergie éolienne et des batteries n’ont cessé de diminuer, parfois jusqu’à 85 %. Un arsenal de plus en plus riche de lois et de politiques améliorent le rendement énergétique, réduisent les taux de déboisement et accélèrent la mise en place d’énergies renouvelables…

Dans tous les secteurs, nous disposons de solutions pour réduire au moins de moitié les émissions d’ici à 2030

D’importantes mesures de transition seront nécessaires dans le secteur énergétique pour limiter le réchauffement climatique. Il faudra notamment réduire considérablement l’utilisation des combustibles fossiles, procéder à une électrification d’envergure, améliorer le rendement énergétique et user de carburants de substitution (tels que l’hydrogène)…

Les villes et les autres zones urbaines offrent également des possibilités non négligeables de réduire les émissions. Nous pouvons diminuer la consommation d’énergie (notamment en créant des villes compactes et propices à la marche), combiner l’électrification des transports avec l’adoption de sources d’énergie à faible émission de carbone, et favoriser les mécanismes naturels d’absorption et de stockage du carbone. Il existe des solutions pour les villes existantes, en croissance rapide ou nouvelles…

La réduction des émissions industrielles passe par une utilisation plus efficace des matériaux, la réutilisation ou le recyclage des produits et la diminution au strict minimum des déchets. Pour les matériaux de base, tels que l’acier, les matériaux de construction et les produits chimiques, les procédés de production à émissions de gaz à effet de serre faibles ou nulles sont en phase pilote ou proches de la commercialisation.

Le secteur industriel est responsable d’environ un quart des émissions mondiales. Réduire les émissions à des valeurs nettes nulles sera un défi et exigera l’adoption de nouveaux procédés de production, la production d’électricité à émissions faibles ou nulles, l’utilisation de l’hydrogène et, dans certains cas, le recours à des mécanismes d’absorption et de stockage du carbone.

L’agriculture, la foresterie et de nouvelles affectations des terres permettent une réduction d’envergure des émissions, de même que le piégeage et le stockage du dioxyde de carbone à grande échelle. Toutefois, les terres ne pourront pas compenser l’ajournement des réductions d’émissions dans les autres secteurs. Nous devons appliquer des solutions ciblées pour favoriser la biodiversité, mieux nous adapter au changement climatique et préserver les moyens de subsistance et l’approvisionnement en nourriture, en eau en bois.

Les prochaines années seront décisives

Dans les scénarios que nous avons évalués, pour limiter le réchauffement à environ 1,5 °C, les émissions mondiales de gaz à effet de serre devraient atteindre leur valeur maximale avant 2025, puis diminuer de 43 % d’ici à 2030 ; il faudrait une réduction parallèle d’environ un tiers du méthane. Même si nous y parvenons, nous risquons fort de dépasser temporairement ce plafond de température, mais nous pourrions redescendre au-dessous pour la fin siècle.

«Si nous n’agissons pas aujourd’hui, il sera trop tard: nous ne pourrons plus limiter le réchauffement de la planète à 1,5 °C», souligne J. Skea. «Sans une réduction immédiate et radicale des émissions dans tous les secteurs, ce sera impossible.»

La température planétaire se stabilisera lorsque les émissions de dioxyde de carbone se seront ramenées à une valeur nette de zéro. Pour limiter l’élévation de la température à 1,5 °C, nous devrons donc avoir ramené les émissions mondiales de dioxyde de carbone à la valeur nette de zéro au début des années 2050; pour la limiter à 2 °C, la date butoir se situe au début des années 2070.

Selon cette évaluation, pour limiter le réchauffement à environ 2 °C, les émissions mondiales de gaz à effet de serre doivent aussi atteindre leur valeur maximale avant 2025 au plus tard, puis diminuer d’un quart d’ici à 2030 ;

Trouver les fonds nécessaires

Le rapport va au-delà des considérations d’ordre technologique pour démontrer que, même s’il faudrait multiplier d’un facteur 3 à 6 les ressources dont nous disposons pour limiter l’élévation de la température à 2 °C à l’horizon 2030, le volume de capitaux et de liquidités disponibles à l’échelle planétaire est suffisant pour atteindre le montant à investir. Tout dépendra de la clarté des signaux que donneront les gouvernements et la communauté internationale, notamment par l’adoption de mesures financières et de politiques plus fermes de la part du secteur public…

Réaliser les objectifs de développement durable

Il ne saurait y avoir de développement durable sans une action climatique accélérée et équitable permettant d’atténuer les effets du changement climatique et de s’y adapter. Certaines solutions permettent d’absorber et de stocker le carbone, tout en aidant les communautés à limiter les effets du changement climatique. Par exemple, dans les villes, il est possible de combiner l’aménagement de parcs, de prés et de zones humides avec le développement de l’agriculture urbaine pour réduire les risques d’inondation et atténuer les effets des îlots de chaleur.

Dans le domaine industriel, les mesures d’atténuation peuvent réduire les conséquences néfastes pour l’environnement et accroître les possibilités d’emploi et les débouchés commerciaux. L’électrification reposant sur des sources d’énergie renouvelable et une réorientation des transports publics peuvent favoriser la santé, l’emploi et les conditions de vie équitables… »

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