Le point sur la protection des lanceurs d’alerte

Publié le 15 avril 2022

La direction des affaires juridiques (DAJ) du ministère de l’économie édite régulièrement une lettre notant les actualités juridiques sur de très nombreux thèmes. Dans sa dernière lettre n° 337 du 7 avril 2022, elle fait le point sur l’état législatif de la protection des lanceurs d’alerte depuis la loi Sapin 2 de 2016 jusqu’aux lois organique et ordinaire du 21 mars 2022. Il est rappelé le rôle du Défenseur des droits à ce sujet et que ce dernier devra faire un rapport public sur le fonctionnement global de la protection des lanceurs d’alerte au Président de la République et aux présidents du Sénat et de l’Assemblée nationale

« Le dispositif de protection des lanceurs d’alerte mis en œuvre par la loi n° 2016-1691 dite “Sapin 2“ du 9 décembre 2016 et transposant au niveau législatif la directive d’octobre 2019 sur la protection des personnes qui signalent des violations du droit de l’Union, les lois organique n° 2022-400 et ordinaire n° 2022-401 du 21 mars 2022 tendent à renforcer cette protection et à faciliter le signalement d’alerte.

La qualité de lanceur d’alerte, définie à l’article 6 de la loi Sapin 2 de 2016, est étendue et pourra désormais être certifiée, sur demande, par le Défenseur des droits sous la forme d’un avis rendu dans un délai de six mois. Certaines conditions restrictives à son acquisition sont dès lors abandonnées telles que (i) la nécessité d’avoir, dans le contexte professionnel, une connaissance personnelle des faits signalés, celle-ci subsistant hors de ce contexte, (ii) le caractère désintéressé du signalement, au profit de la notion d’absence de contrepartie financière et (iii) le caractère grave et manifeste de la violation signalée, permettant le signalement de tentatives de dissimulation d’une violation.

Afin de protéger les personnes proches de lanceurs d’alerte d’éventuelles représailles interdites dont la liste est complétée (intimidation, atteinte à la réputation sur les réseaux sociaux…) et des procédures “bâillons“ (plainte pour diffamation par exemple), un nouveau statut de “facilitateur“ est créé permettant d’inclure toute personne physique (collègue) ou toute personne morale de droit privé à but non lucratif (syndicat, association) aidant un lanceur d’alerte à effectuer un signalement ou une divulgation. De plus, afin de protéger les journalistes et leurs sources, le statut de lanceur d’alerte peut leur être reconnu dès lors que leur identité a été révélée à la suite d’un signalement ou d’une divulgation publique.

Tandis qu’auparavant un signalement au sein d’une entreprise devait précéder tout signalement auprès d’une autorité externe et qu’une divulgation publique ne devait intervenir qu’en dernier ressort, les nouvelles dispositions permettent aux lanceurs d’alerte d’effectuer directement un signalement externe auprès de différentes autorités dont la liste sera déterminée par décret en Conseil d’Etat.

En revanche, dans les cas où une autorité externe ne s’estimerait pas compétente, le Défenseur des droits – en particulier son nouvel adjoint créé à cet effet – devra réorienter les alertes vers l’autorité compétente. Il aura également pour mission d’informer et conseiller les lanceurs d’alerte – ainsi que les facilitateurs – qui pourront directement lui adresser un signalement et défendre leurs droits et libertés.

La divulgation publique est mieux encadrée et peut désormais s’effectuer en cas d’absence de (i) traitement à la suite d’un signalement externe dans un délai fixé par décret en Conseil d’Etat – 7 jours maximum pour accuser réception et de 3 à 6 mois pour fournir un retour d’information ; (ii) risque de représailles ou si le signalement n’a aucune chance d’aboutir (iii) danger grave et imminent ou, pour les informations obtenues dans un cadre professionnel en cas de danger imminent ou manifeste pour l’intérêt général.

Afin d’écarter les éventuelles conséquences pénales, civiles et financières d’un signalement, les lanceurs d’alerte voient leur irresponsabilité étendue et pourront se voir accorder un soutien financier, sous la forme d’une provision pour frais de justice octroyée par le juge, dans le cadre d’une contestation de leur part de mesures de représailles ou de procédure “bâillon“. Ce soutien pourra leur être accordé sous forme de provision dans le cas où leur situation financière s’est fortement dégradée. Ces provisions pourront être déclarées définitives par le juge à tout moment et cela même en cas de perte du procès par le lanceur d’alerte. De même, des mesures de soutien psychologique et financier pourront être prises par les autorités externes.

Enfin, afin d’évaluer le fonctionnement global de la protection des lanceurs d’alerte, le Défenseur des droits présentera un rapport public sur le sujet au Président de la République et aux présidents des assemblées. »

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