Pour la vérité et la justice. Histoires de luttes populaires

Publié le 5 mai 2023

Philippe Artières, historien, directeur de recherche au CNRS, publie « La mine en procès. Fouquières-lès-Lens, 1970 », éd. Anamosa, mars 2023, 255 p.

Cet ouvrage rapporte l’enquête populaire menée sur l’explosion dans la mine de Fouquières-lès-Lens qui a tué 16 mineurs le 4 février 1970, et l’organisation du tribunal populaire à Lens le 10 décembre 1970, sous l’autorité de Jean-Paul Sartre, pour lancer l’alerte et révéler les responsables.

Parmi les nombreux documents d’archives sur cette lutte, figure le « Journal d’une veuve de mineur », gardé par la compagne de Jean-Pierre Antinori, mineur tué dans cette explosion, avec cette page de ce journal :

Voici la présentation du livre  par l’éditeur de cet ouvrage :

« Le 4 février 1970, une explosion dans la mine de Fouquières-lès-Lens provoque la mort de 16 travailleurs. S’ensuit une longue mobilisation des mineurs, des syndicats, de la Gauche prolétarienne, d’intellectuels, d’artistes, d’ingénieurs et de médecins… Dans l’histoire de la mine, cet épisode est aussi annonciateur de nouvelles modalités de luttes dont les soulèvements contemporains sont héritiers.

Quelques jours après la catastrophe, rapidement suivie des funérailles, le 7 février, des mineurs morts tragiquement dans la fosse 6 de la mine de Fouquières-lès-Lens, de jeunes militants maoïstes lancent des cocktails Molotov sur les bureaux de la direction à Hénin-Liétard. S’engage alors tout au long de l’année 1970 une série de mobilisations, allant de l’occupation sans précédent de l’École des mines à Paris par des élèves ingénieurs, jusqu’à la tenue à Lens d’un tribunal populaire le 10 décembre, présidé par Sartre. En  parallèle, des enquêtes controversées sont menées sur les responsabilités engagées dans l’accident, et des mouvements d’extrême gauche subissent une forte répression.  De leur côté, un collectif d’artistes mené par Merri Jolivet et les peintres Aillaud, Fromanger et Mathelin, conçoivent une exposition au profit des familles des victimes.

Philippe Artières livre le récit et l’analyse de cet épisode méconnu. L’accident, l’émotion et le déroulement des funérailles obéissent à une scénographie bien connue, celle de la vieille histoire de la mine. Dans ses sites et ses moments rituels, ses figures et ses discours, les gestes d’une longue généalogie des catastrophes minières sont ici réitérés. Mais le contexte historique est aussi celui de nouvelles modalités de contestation où se joignent aux mineurs, à leurs défenseurs institutionnels ‒ PCF et CGT ‒, ou libertaires et révolutionnaires ‒ la GP et les maos ‒,  ceux que Michel Foucault appelait « intellectuels spécifiques » : ingénieurs, médecins et artistes. La narration très incarnée vise à faire entendre la voix des différents acteurs au plus près, grâce à la collection de documents largement inédits. Générations et cultures de luttes avec leurs références propres s’entrechoquent. Elles marquent un renouvellement majeur dans l’histoire des luttes sociales dont la filiation avec les soulèvements et modes d’actions très contemporains est évidente, des lanceurs d’alerte aux jeunes étudiants « bifurqueurs ».

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