L’utilité de l’interpellation citoyenne à Grenoble

Publié le 16 juin 2023

Interpellation citoyenne « Stop au bruit » à propos du bar à bière, « Jardin Biergarten », sis 18 rue Thiers qui utilise une terrasse sur terrain privé d’une capacité de plus de 100 personnes. Cet établissement est ouvert jusqu’à 1 h 45 du matin, du mardi au samedi. La terrasse est située entre les cours intérieures de plusieurs immeubles, ce qui crée une véritable caisse de résonance. Etant donné sa capacité hors norme et sa plage d’ouverture jusque très tard, les nuisances sonores créées rendent le quartier invivable la nuit.

Les pétitionnaires demandent la fermeture de la terrasse du Jardin Biergarten dès le début de la soirée afin de rendre au quartier sa tranquillité et tout simplement de permettre aux gens de se reposer et de dormir dans le calme comme ils en ont le droit.

La Ville affirme son soutien au collectif de riverains mobilisés. Elle va utiliser les moyens d’actions dont elle dispose pour agir en vue de limiter les nuisances constatées sur place par les résidents.

Le compte-rendu des deux rencontres de médiation entre le collectif de riverains et les représentants de la ville (élu-es et services) est public et apporte des informations intéressantes sur les difficultés existantes pour réprimer les incivilités et atteintes à la tranquillité publique dues aux nuisances nocturnes. Notamment la répartition des compétences entre la commune et la préfecture. Des informations apportées dans ce compte rendu peuvent être utiles pour d’autres cas.

Voici des extraits de ce compte-rendu :

« 1) Autorisation de licence IV

Question du collectif : Comment le Jardin Biergarten a-t-il obtenu la licence IV auprès de la Ville ? Quels critères sont utilisés dans le cadre d’une telle demande ? La Ville aurait-elle pu refuser la licence ? Peut-elle maintenant revenir sur cette autorisation ?

Réponse Ville :

Les demandes de licence 4 ou de transfert de licence 4 (entre deux établissements) sont traitées administrativement par la ville de Grenoble et en particulier par le service « relation aux usagers ». Lors de la remise du dossier, sont vérifiés un certain nombre de points qui pourraient empêcher la délivrance ou le transfert de la licence 4 conformément au Code de santé publique. Les débits de boissons à consommer sur place ne peuvent être établis à moins de 100 mètres autour des établissements suivants (distance définie par arrêté préfectoral) :

  • Etablissements de santé, centres de soins, d’accompagnement et de prévention en addictologie et centres d’accueil et d’accompagnement à la réduction des risques pour usagers de drogues ;
  • Etablissements d’enseignement, de formation, d’hébergement collectif ou de loisirs de la jeunesse ;
  • Stades, piscines, terrains de sport publics ou privés.

L’intérieur des édifices et établissements en cause est compris dans les zones de protection ainsi déterminées.

L’existence de débits de boissons à consommer sur place régulièrement installés antérieurement ne peut être remise en cause pour des motifs tirés du présent article.

Dans les communes où il existe au plus un débit de boissons à consommer sur place, le représentant de l’Etat dans le département peut autoriser, après avis du maire, l’installation d’un débit de boissons à consommer sur place dans les zones faisant l’objet des dispositions du présent article lorsque les nécessités touristiques ou d’animation locale le justifient.

Une fois le dossier déposé et conforme à la loi, la licence 4 est délivré. Charge ensuite aux services de la préfecture au travers de la commission bar et débit de boissons de contrôler le bon usage de la licence 4.

L’ouverture ou la reprise d’un bar ou d’un bar-restaurant dans lequel sont vendues des boissons alcoolisées impose d’être titulaire d’une licence ainsi que d’un permis d’exploitation. Il en est de même en ce qui concerne tout gérant ou tout propriétaire d’un commerce de détail vendant des boissons alcoolisées.

Attribution de la licence IV au Jardin Biergarten

Le propriétaire du débit de boissons du Jardin Biergarten a déposé une demande de licence de boissons alcoolisées à emporter le 28/02/2022 puis a demandé dans le même temps une translation intra-urbaine d’une licence 4 provenant de l’établissement qui venait de fermer « CHARLIES DINNER » situé à Grand-place (commune de Grenoble). Le dossier, à l’examen de celui-ci, était conforme et respectait la législation en vigueur d’où une délivrance de la licence 4.

2) Autorisations d’urbanisme réglementaire (permis de construire, déclaration ERP)

Rappel : les autorisations d’urbanisme concernant les établissements recevant du public (ERP) sont accordées sur des critères relevant de l’urbanisme, et sur le volet ERP relevant de la sécurité incendie et de l’accessibilité. Si le dossier est conforme à ces critères, la Ville ne peut pas refuser les dossiers pour des raisons autres (craintes de nuisances sonores par exemple)

Constats sur les démarches effectuées par le Jardin Biergarten :

  • L’établissement a effectué plusieurs demandes d’autorisation successives, et n’a pas communiqué sur la destination finale du projet (bar), rendant difficile l’identification d’un potentiel problème par les services municipaux au moment de l’instruction des dossiers. À noter que le demandeur n’est pas tenu de communiquer sur son activité précise au moment de ces démarches ; seule la destination au sens de l’urbanisme est connue (ici, sous destination restaurant, qui inclut les bars).
  • Les autorisations d’urbanisme et liées à l’ERP ont bien été délivrées conformément aux dispositions d’urbanisme et liées à la sécurité et accessibilité, et ont donc été acceptées par la Ville.

Actions prévues ou engagées par la Ville :

  • À ce jour, la déclaration attestant l’achèvement et la conformité des travaux (DAACT) n’a pas été déposée, alors que l’établissement a ouvert ses portes au public. Le service urbanisme va donc demander le dépôt de cette déclaration, afin de pouvoir réaliser une visite de conformité sur place.
  • L’étage du bâtiment semble occupé par des logements (présence de boîtes aux lettres, annonces de location sur une plate-forme en ligne), or la destination officielle du bâtiment apparaît être aujourd’hui un local d’activité. Le service urbanisme va procéder à la constatation de l’infraction, ce qui aura pour conséquence d’obliger l’établissement à se mettre en conformité sur la destination de cette partie du bâtiment.
  • Une visite pour vérifier les éléments de sécurité et de jauge maximale est prévue en lien avec le service départemental d’incendie et de secours (SDIS) de l’Isère. La visite permettra de préciser si une jauge ou des éléments de sécurité sont applicables à la terrasse de l’établissement ou non

3) Places de livraisons

Demande des porte-paroles : la Ville peut-elle déplacer ces places de livraisons pour libérer cet espace public pour une utilisation autre que commerciale, dans la mesure ou l’établissement pourrait de faire livrer dans le passage du Biergarten ?

Réponse Ville : la Ville va effectivement demander le déplacement de cette zone de livraison si c’est possible.

Levier d’action : dossier de demande de fermeture administrative en lien avec les services de la préfecture

La Ville n’a pas le pouvoir de fermer ou de contraindre un établissement situé sur un terrain privé, mêmes si les nuisances sonores sont avérées pour les riverains. Contrairement aux terrasses situées sur le domaine public, ici la Ville ne peut pas agir sur les horaires de fermeture par exemple, les autorisations étant donnée par la préfecture.

Toutefois, la Ville va demander aux services de l’État des restrictions concernant cet établissement (fermeture administrative temporaire par exemple). Pour cela, il est nécessaire de constituer un dossier le plus complet possible (courrier d’avertissement, recensions d’appels des riverains, comptes-rendus des passages de la police municipale (PM) sur site, liste de constatations d’infractions éventuelles photos, retours des différents services concernés…), pour justifier de la nécessité de prendre des mesures. Ce dossier est en cours de construction, la Ville est déjà en relation avec la préfecture dans ce cadre.

Le collectif de riverains, désormais constitué en association, est invité à transmettre des éléments permettant d’alimenter ce dossier en cours de constitution.

Levier d’action : action de la police municipale (PM)

Précisions sur les mesures et leviers réglementaires concernant les nuisances sonores

Les bruits de comportement (bruits de voix) ne sont pas réglementés par des seuils sonores définis. L’appréciation de la nuisance se fait à l’oreille. Les agents de police, municipale ou nationale, peuvent sur cette appréciation à l’oreille verbaliser pour tapage. Des passages de la PM ont ainsi déjà donné lieu à plusieurs verbalisations.

Connaître le niveau sonore pourrait servir éventuellement comme indicateur à l’appui d’une démarche de droit privé (code civil, trouble de jouissance) et dans ce cas il n’y a pas besoin d’utiliser un sonomètre homologué. Il existe des applications qui peuvent être téléchargées sur des téléphones portables.

Les mesures de bruit sont effectuées par la Ville lorsque les sources de nuisance sonore sont des sons amplifiés ou des équipements d’activité professionnelle (hotte, climatisation, groupe froid…), pour lesquels des seuils réglementaires doivent être respectés (code de la santé publique, code de l’environnement). Le service Santé environnementale l’effectue au domicile d’un riverain lorsqu’un établissement refuse de faire réaliser par un bureau d’étude acoustique une étude d’impact des nuisances sonores (EINS), ou bien lorsque l’établissement
refuse de mettre en œuvre les préconisations de cette étude.


Leviers d’actions mobilisés par la Ville au titre de son pouvoir réglementaire de police :

  •  Courrier d’avertissement au propriétaire, envoyé le 16 décembre 2022.
  • Passages réguliers de la police municipale pour constater et verbaliser le tapage dans l’établissement (en cours, consignes données de passages plus fréquents). A noter toutefois, la police municipale ne peut pas vider l’établissement et le faire fermer immédiatement, même en cas de tapage constaté, ce n’est pas dans ses compétences.
  • Passages au moment de la fermeture du bar, pour limiter les troubles à l’ordre public.
    Si l’établissement ne fait rien pour limiter les troubles au moment de la fermeture, cela peut être un argument supplémentaire pour alimenter un dossier de fermeture administrative auprès des services de la préfecture.


Le collectif de riverains est invité à appeler la police municipale (Numéro unique de la PM :
04 76 46 74 97 jusqu’à 3h du matin) ou police nationale en cas de nuisances constatées, pour
permettre un bon suivi du dossier. »

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