Jean Jonot, un militant écologiste infatigable (1934-2023)

Publié le 14 juillet 2023

A 89 ans, Jean nous abandonne au bout d’une vie d’une richesse exceptionnelle; à toute sa famille et ses proches nos profondes condoléances.

Jean était un grenoblois de longue date, enseignant et guide de haute montagne, mais pour nous il était l’incarnation du militant de gauche et écologiste liant actions et réflexions, sans jamais dévier de ses valeurs profondes.

Il a été citoyen dans toutes les dimensions de sa vie, un amoureux des droits et des libertés, toujours conscient du décalage entre les combats d’idées et le temps d’évolution de la société.

Jean était un amoureux de la vie, une conscience aiguë de la vulnérabilité et de la finitude du vivant, un épicurien et un adepte du débat d’idées.

En 1982 il participe à la fondation de Grenoble Ecologie Autogestion (GEA) qui deviendra plus tard l’ADES et participera soit en tant que candidat, soit en soutien très actif à toutes les campagnes municipales des écologistes à Grenoble depuis 1977.

Militant écologiste de la première heure, co-fondateur des Amis de la Terre Isère, il a été un militant très actif sur tous les combats écologistes en particulier il avait une forte résistance contre tous les GPI (grands projets inutiles) :  contre la nucléarisation de notre région notamment contre Superphénix, contre le développement des autoroutes (tout particulièrement contre l’A51) et pour l’un de ses derniers combats contre les autoroutes, il a été un des 5 citoyen-nes à mener un recours contre l’élargissement de l’A480 qui n’a pas abouti. Il militait activement contre le Center parcs dans les Chambaran à Roybon qui ne verra jamais le jour et le projet Lyon-Turin, inutile, trop cher et dangereux pour les ressources en eau.

Il avait aussi une façon de lutter en mettant en lumière la beauté par exemple avec l’exposition itinérante de 51 artistes contre l’A51, dont il a été l’initiateur et un des acteurs.

La liste de ses combats est trop longue pour être retracée ici dans le détail, partageons juste quelques-uns de ses écrits :

Dans le premier numéro du « Le Rouge et le Vert » de novembre 1983, Jean rédigeait un petit article : « Une priorité pour la santé des Grenoblois » où il demandait l’interdiction du plomb dans l’essence qui atteignait la santé des enfants et s’adressait à la mairie pour que Grenoble devienne une ville pilote, mais sans succès.

Et tout récemment :

Le 4 novembre 2022, il écrit :

« En préliminaire, ce texte extrait de « Parachutiste » de Maxime le Forestier, à dédier à Darmanin :

« Alors, de combat en combat s’est formée ton intelligence tu sais qu’il n’y a ici-bas que deux engeances les gens bien et les terroristes… »

La question se pose : qui est éco-terroriste ou plus justement écocideur ?

                                    où sont et qui sont les criminels responsables des écocides ?

Trois exemples :

    – poursuivre une politique conduisant à permettre à une petite minorité (5%) de s’approprier la quasi-totalité des ressources en eau pour continuer de réaliser des profits résultant d’une agriculture industrielle polluante, c’est de l’écocide.

   – poursuivre une politique énergétique conduisant à multiplier les centrales nucléaires, alors qu’on sait que le réchauffement climatique ne permettra pas le refroidissement nécessaire de ces centrales en fonctionnement, la température des rivières étant devenue trop élevée, c’est de l’écocide.

   –  poursuivre une politique conduisant à augmenter encore le nombre de déchets radioactifs qu’on ne sait pas traiter et qui constitue une menace mortelle pour les générations futures pendant des milliers d’années, c’est de l’écocide.

Quel tribunal pour les criminels responsables de ces écocides ? »

A propos de la lutte contre la réforme des retraites, le 22 janvier 2023

NOUS Y SOMMES !

Le jour d’avant que la machine ne se bloque et parte en vrille.

Deux logiques s’affrontent :

  •  l’une continuant de vouloir faire prospérer une économie profitant à une petite minorité de ce pays, et du monde.
  • l’autre, hétéroclite, ayant en commun de vouloir mieux que survivre, et refusant avec force l’inégalité de plus en plus forte qui prévaut dans notre société.

Il n’est pas étonnant que l’explosion se produise sur la question de la retraite car c’est du temps de vie qu’il s’agit. Quoi de plus important, quoi de plus clivant ?

Déjà il y avait eu le constat qu’on ne vivait pas aussi longtemps selon la case sociale où l’on avait atterri. Et voici que ceux qui sont les mieux dotés de ce point de vue veulent décider que les autres, la majorité des habitants, disposeront de moins de temps de vie, de façon à ce que eux-mêmes, les nantis, puissent continuer de bénéficier de leur rente de situation. Et ce, au nom de l’intérêt général et en invoquant la justesse du projet de réforme ! Pas étonnant que l’étincelle ne mette le feu au cœur de cette poudrière sociale. La contradiction au cœur du système devient flagrante (et déflagrante) pour tous, et plus jamais personne ne pourra faire que cette révélation n’ait pas eu lieu.

Et voici un court extrait de ses dernières réflexions sur la servitude volontaire qui tend à se généraliser (en mai 2023), l’introduction :

 « Vers une servitude volontaire généralisée

Voici 450 ans était publié « Traité de la servitude volontaire », écrit à 16 ans par Etienne de la Boétie.

Cela lui valut l’estime de ses contemporains sachant lire, et l’amitié indéfectible de son aîné et presque voisin Michel de Montaigne. Et à nous il propose encore la base d’une analyse et d’une réflexion sur un phénomène toujours d’actualité, sous sa forme classique à grande échelle, en Russie, en Chine, en Corée du Nord, ou sous des formes nouvelles jusque dans nos pays ayant pourtant bénéficié des acquis du Siècle des Lumières et de la Révolution Française.

En très résumé, son interrogation portait sur le fait que des milliers et plus de personnes acceptaient la servitude imposée par un seul homme, alors qu’il leur suffisait non pas de se battre et d’agir, mais simplement de ne plus agir, de ne plus obéir au tyran.

Son interrogation est toujours d’actualité, même si les formes prises par la servitude se sont diversifiées. Mais l’objectif global reste le même : mettre en état de servitude la majorité des habitants d’un pays, d’une région du monde. Des formes souvent mondialisées, très brutalement visibles en Russie ou en Chine, et l’on parle de dictature, plus insidieusement dans nos démocraties occidentales, avec des formules un peu différentes selon les pays, Suède, Italie, ou France, par exemple. On peut se risquer à dire que l’on a maintenant affaire à la mise en place d’une servitude volontaire généralisée. D’où le sujet proposé.

A part la lutte contre le réchauffement climatique qui tarde toujours autant à s’engager « pour de vrai », nous n’avons probablement rien de plus urgent à faire que d’ouvrir ou d’élargir le vaste chantier qui consiste à :

1. recenser les générateurs de peurs

2. recenser les sapeurs de force

3. recenser les poches de résistance ….

Et la conclusion :

Après la lutte pour le climat et celle encore plus difficile et essentielle contre l’effondrement du vivant, aucune tâche que la lutte contre la généralisation de la servitude volontaire ne paraît plus urgente, aucune tâche nécessitant l’implication du plus grand nombre. Et ceci sans avoir à se mobiliser, à prendre les armes, mais seulement en cessant d’obéir, en sachant comment cela peut se concrétiser dans le contexte de notre société centralisée et technicisée.

Plus personne alors ne pourra nous faire marcher au pas vers ce lieu de presque mort que l’Entreprise mondialisée veut nous vendre, comme si c’était cela la VIE.

« La liberté des autres étend la mienne à l’infini », nous avons le plus urgent besoin d’un flot de Bakounine. »

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