La ZFE se met en place dans l’agglomération malgré le brouillage du gouvernement

Publié le 14 juillet 2023

Il est maintenant très clair que le gouvernement n’a mis en place les Zones à Faibles Emissions que pour se protéger des recours au Conseil d’Etat ou par la Commission européenne et non pour des raisons de santé publique.

Pour les agglomérations où les niveaux de pollution sont en dessous des seuils actuels (comme Grenoble), le gouvernement indique qu’elles peuvent s’abstenir de mettre en place une ZFE, alors que tout le monde sait que les seuils vont être très bientôt revus à la baisse pour rejoindre les niveaux fixés par l’OMS. La pollution même au niveau des seuils actuels tue et rend malade. C’est bien pour ces raisons de santé publique qu’il faut diminuer fortement les polluants (notamment les NOx et les particules fines).

Le président de la Métro a signé le 7 juillet l’arrêté qui met en place concrètement la ZFE-m dans 13 communes de l’agglomération.

Il n’y a pas de changement par rapport au projet d’arrêté qui avait été mis en débat lors de la consultation règlementaire qui s’était terminée le 17 mai. Voir la contribution de l’ADES ici. Et le bilan de cette consultation sur le site de la Métro.

L’arrêté prévoit des dérogations, voir les détails sur ce site.

Face à ce brouillage du gouvernement, la Métro a réagi par un communiqué :

« Lundi 10 juillet 2023, suite aux déclarations de Christophe BÉCHU, Ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, Grenoble Alpes Métropole a appris que son territoire est maintenant considéré comme un « territoire de vigilance » et « n’aurait pas l’obligation d’interdire les CQA3 au 1er janvier 2025 ». Qu’en est-il des CQA 5 et 4 ?
Sur un enjeu de santé publique majeur, sur un enjeu où la lisibilité est essentielle vis-à-vis des habitants, sur un enjeu où un cap clair est attendu, tout comme des mesures d’accompagnement fortes, avec le soutien renforcé de l’Etat que nous attendons et sollicitons depuis des années, nous déplorons une annonce imprécise à ce stade, sans concertation avec les collectivités que nous sommes, et dans un calendrier surprenant. Qui plus est à l’heure où sont en discussion à l’échelle européenne le renforcement des normes en matière de qualité de l’air.
A l’heure également où l’Etat est condamné par la Commission européenne et le Conseil d’Etat en raison de l’insuffisance des mesures prises pour garantir la qualité de l’air. A l’heure également où la ZFE pour les véhicules particuliers sur le territoire métropolitain grenoblois, comme ailleurs, se met en place en cohérence avec la Loi Climat et Résilience de 2021, du Plan de Protection de l’Atmosphère ainsi que de l’avis du Préfet dans la consultation réglementaire ZFE qui indiquait que le territoire reste « soumis aux exigences du Plan de Protection de l’Atmosphère (PPA) Grenoble Alpes Dauphiné 2022-2027, et donc à l’obligation de mettre en place une ZFE pour véhicules particuliers a minima selon le calendrier demandé par la loi ».
A ce stade, Grenoble Alpes Métropole attend des précisions de la part du Gouvernement et des services de l’Etat afin de savoir précisément ce qu’il en est de sa situation. Quoi qu’il en soit, cette manière de faire est tout sauf sérieuse ; les règles ne peuvent pas changer tous les 2 ans ! »

L’association des élu-es des grandes villes et des métropoles a remis au gouvernement le 10 juillet un rapport intitulé : « Les Zones à Faibles Émissions, 25 propositions pour allier transition écologique et justice sociale ».

« Depuis 2019, France urbaine estime que les Zones à Faibles Émissions permettront d’améliorer la qualité de l’air mais qu’elles ne seront efficaces que si elles sont socialement justes et acceptées sur les territoires.

Les 25 propositions formulées dans ce rapport sont réparties en six enjeux. Elles résultent d’un consensus exigeant et systématique entre tous les participants aux ateliers du groupe de travail.

Voici les 10 principales propositions :

  1. Rendre éligibles aux aides de l’Etat les habitants et les usagers des territoires voisins impactés par la mise en place d’une ZFE, au même titre que ceux habitant sur les territoires de mise en œuvre d’une ZFE.
  2. Doubler les aides de l’État, notamment la prime à la conversion, et les compléter par des aides proposées par les territoires. 
  3. Instaurer, avec l’intercommunalité comme pilote, un guichet unique dans le territoire en charge de la mise en œuvre de la ZFE pour permettre un accompagnement de proximité et simplifier les démarches pour les citoyens.
  4. Etendre et garantir le prêt à taux zéro et ajuster le microcrédit afin de rendre quasi systématique l’avance des aides par un organisme financier ou un tiers.
  5. Renforcer les alternatives de mobilité, y compris dans les territoires périurbains.
  6. Financer massivement les mobilités durables, notamment en déplafonnant les versements mobilité.
  7. Proposer une autorisation de circulation jusqu’en 2030 pour les véhicules Crit’Air 0, Crit’Air 1 et Crit’Air 2 pour les poids lourds et les véhicules utilitaires légers.
  8. Faciliter le leasing social.
  9. Instaurer des dérogations « petit-rouleur ».
  10. Faire évoluer la vignette Crit’Air afin que soit prise en compte la réalité des polluants atmosphériques et pas uniquement l’âge du véhicule. »

Les associations RESPIRE, CLEAN CITIES et la FABRIQUE DES MOBILITES ont présenté leur livre blanc le 4 juillet 2023 :

« Pour des Zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m) saines et justes : anticiper la transition des mobilités

Constatant, après une grande consultation, que le dispositif ZFE-m rencontre localement et nationalement des oppositions politiques et soulève des questions d’acceptabilité et de justice sociale auxquelles il nous faut répondre. Elles appellent les pouvoirs publics à se saisir de l’ensemble de leurs recommandations et à prendre des mesures concrètes pour sécuriser le déploiement des zones à faibles émissions ZFE-m.

Si la validité de la mesure est rarement remise en question, c’est sur la mise en œuvre que les critiques portent. Parmi elles :

  • Une perception d’injustice sociale ;
  • Un manque de connaissance et de lisibilité des ZFE-m ;
  • Un manque de moyens des professionnels dépendants de leur véhicule pour changer leur flotte (artisans, TPE, PME) ;
  • Un manque de moyens de ménages à faibles revenus pour changer de véhicule,
  • Le spectre de l’interdiction du diesel et les difficultés du choix de carburants pour les logisticiens,
  • La perception d’une politique de transition focalisée sur le tout-voiture électrique,
  • Un “bras de fer” entre l’État et les collectivités sur le déploiement des ZFE-m (contrôle, financement, procédures)

… qui sont autant d’obstacles qui empêchent sa mise en œuvre.

Concrètement, les structures auteurs du livre blanc proposent

5 piliers et 10 mesures concrètes à mettre en œuvre :

1.     Créer un calendrier unifié et réviser les vignettes Crit’Air en intégrant le poids du véhicule

–          Instaurer un calendrier légal unifié pour les 43 agglomérations (fin des Crit’Air 4, 5 et non classés en 2025 ; fin du Crit’Air 3 en 2028 ; fin du Crit’Air 2 en 2030 et intégration des normes Euro 6d – 6d temp. et Euro 7 au Crit’Air 1)

–          Rétrograder les véhicules thermiques lourds (supérieurs à 1400 kg) d’une classe dans la limite de Crit’Air 3

–          Bonifier les véhicules thermiques actuellement Crit’Air 3 (inférieurs à 1400 kg) en Crit’Air 2

2.     Stimuler le marché de l’occasion de demain en s’appuyant sur les flottes automobiles professionnelles

–          Rendre contraignants les objectifs de la LOM de verdissement des flottes professionnelles (entreprises, administrations, taxis et VTC) avec contrôles et sanctions

3.     Élaborer une stratégie industrielle nationale de production de véhicules légers

–          Inscrire dans le contrat de filière automobile en cours de discussion, la production de petits véhicules électriques

–          Développer la filière des véhicules intermédiaires légers

4.     Planifier les alternatives à la route de façon systémique pour articuler le court terme et le long terme

–          Adopter une vision systémique de la planification des mobilités, en prenant en compte : transports alternatifs, intermodalité, place de la route, espace public (urbanisme, aménagement du territoire), comportements, logistique, qualité de l’air, numérique en mobilité

–          Planifier dès maintenant les mobilités alternatives (moyen-long terme), en articulation avec la route (court terme) ex. : loi de programmation des investissements pour les transports publics

5.     Assurer l’équité via le paramétrage des ZFE-m

–          Cibler les aides à l’achat de voitures particulières vers les plus précaires et en garantir l’accès

–          Moduler les interdictions par l’usage (pass ZFE, horaires)

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