« No parking, no business » en centre-ville : un mythe à déconstruire

Publié le 31 mai 2024

Un article de Mathieu Chassignet, ingénieur transports et mobilité à l’Ademe dans le média The Conversation, déconstruit un mythe qui est fortement ancré notamment chez certains commerçants des centre villes. Cet article est fondé sur des études réalisées dans différentes grandes villes et non sur les présupposés qui pourraient être discutables.

Voici des extraits de cet article :

« Pour répondre aux difficultés du commerce de centre-ville, deux écoles se font face :

  • La première, souvent prônée par les commerçants, consiste à faciliter la circulation et le stationnement automobile en espérant drainer des clients éloignés.
  • La seconde, au contraire, propose de travailler sur l’ambiance urbaine, en reprenant de l’espace à la voiture au bénéfice des piétons, en misant sur le fait que ces derniers auront davantage tendance à venir s’y promener et y consommer.

Sur ce sujet sensible où opinions et ressentis dominent, rares sont les études qui se sont penchées sur la mobilité des clients qui fréquentent les commerces de centre-ville pour objectiver le débat. Quelques-unes existent toutefois, menées à Rouen, à Lille ou encore à Nancy.

Toutes mettent en évidence les mêmes constats : la plupart des clients vivent à proximité des commerces, viennent majoritairement à pied et en transport collectif et appellent de leurs vœux des espaces apaisés et une place restreinte de la voiture. De leur côté, les commerçants surestiment systématiquement l’usage de l’automobile par leurs clients.

La majorité des clients sont piétons

Deuxième constat, la plupart des consommateurs du cœur des grandes villes s’y rendent à pied, mode de déplacement qui arrive en général devant les transports collectifs puis la voiture.

  • A Lille, la marche constitue ainsi le mode de déplacement de 42 % des clients, les transports en commun 28 % et la voiture 21 %.
  • À Nantes, ces parts s’élèvent respectivement à 27 %, 38 % et 21 %.
  • À Saint-Omer, qui ne compte que 13 000 habitants, près de 40 % des clients viennent à pied et 60 % en voiture. Si elle est minoritaire, la marche reste bien présente.

Cette répartition modale apparaît très dépendante de la taille des villes : à Paris, 5 % des clients arrivent en voiture, tandis que cette part est d’environ un tiers dans les villes autour de 100 000 habitants. Et même dans une ville comme Cahors, qui compte 20 000 habitants, seuls 45 % des clients des commerces de centre-ville y vont en voiture, à égalité avec la marche.

Les commerçants surestiment leurs clients automobilistes

Enfin, et c’est sans doute le constat le plus important pour comprendre la teneur des débats, les études révèlent que les commerçants surestiment largement la part de clients qui viennent en voiture.

À cet égard, l’exemple le plus frappant est celui de Nancy, où les commerçants interrogés croyaient que 77 % de leurs clients venaient en voiture : c’est en réalité le cas de… 35 % d’entre eux. Ils imaginaient également que les piétons ne représentaient que 11 % de leur clientèle, contre 39 % dans les faits, et que 1 % s’y rendaient à vélo, alors que les cyclistes composent 13 % de leurs acheteurs.

Cette surestimation a pu être observée dans beaucoup d’autres villes. Dans ce contexte, il est peu surprenant que les commerçants craignent plus que tout les projets de réduction de la place de la voiture…

Mots-clefs : , ,

Le commentaires sont fermés.