Le service public du chauffage urbain et l’évolution climatique

Publié le 29 novembre 2024

La lecture des rapports de la société d’économie mixte SEM CCIAG, dite Compagnie de chauffage, adoptés fin décembre 2023 par l’assemblée générale de la société donne des informations importantes sur sa stratégie financière. La délégation de service public (DSP) avec la SEM CCIAG a été décidée par le conseil de la métropole en 2018 pour une durée de 15 ans.

Ce contrat de DSP a marqué une nouvelle époque dans la gestion de ce service public concédé par la collectivité publique à la Compagnie de chauffage, car sa gestion a été dans le passé entachée d’illégalités et d’infractions par ses dirigeants, des affidés de Carignon, ce qui nous avait obligé à faire juger par le tribunal administratif que tous les tarifs affectés aux usagers de 1983 à 2008 étaient illégaux, et que les nombreuses illégalités dans la gestion de cette SEM n’avaient pas été corrigées par M. Destot.

Un changement important date de 2014 lorsque la nouvelle majorité grenobloise décide que les directeurs généraux des SEM seront nommés par l’actionnaire public majoritaire et non par les actionnaires privés…

Ce rapport de gestion de la Compagnie de chauffage, ainsi que les rapports des commissaires aux comptes, et les rapports des représentants des collectivités publiques (Ville de Grenoble et métropole) au conseil d’administration de la SEM, ont été présentés récemment au conseil métropolitain et au conseil municipal de Grenoble.

On y apprend des données importantes qui interrogent sur la stratégie financière de cette DSP au vu des évolutions climatiques nettement plus importantes que celles prises comme hypothèses lors de l’élaboration du contrat de délégation de service public.

Pour le chauffage urbain, le paramètre important est l’évolution des DJU (degré-jour-unifié) qui permet de mesurer l’évolution climatique dans notre territoire. Le degré jour unifié (DJU) est la différence entre la température extérieure et une température de référence qui permet de réaliser des estimations de consommations d’énergie thermique pour maintenir un bâtiment confortable en proportion de la rigueur de l’hiver.

L’évolution depuis 1999 indique qu’une régression moyenne annuelle des DJU depuis 1999 au Versoud est de -11,5 DJU, alors que l’estimation qui a été prise pour le contrat de DSP est de -7 DJU. Pour le département de l’Isère depuis les 20 dernières années la diminution moyenne a été d’au moins 20 DJU par an.

Or cette accélération de la diminution moyenne des DJU a des conséquences négatives sur l’équilibre économique du contrat de délégation de service public. En effet la structuration des tarifs entre partie fixe et partie variable ne représente pas la réalité financière de ce service public. Comme tout service de réseau, la partie fixe domine largement la partie variable des budgets. On est plus près de 60 % de partie fixe et de 40 % de partie variable.

Le Collectif des usagers pour un chauffage urbain juste et solidaire, qui s’est créé dans les années deux mille et a agi à Grenoble et dans l’agglomération pour défendre les intérêts des usagers du service public, avait beaucoup insisté pour que la partie variable du tarif dépasse largement la partie fixe afin d’encourager les usagers à faire des économies d’énergie qui se voient rapidement dans leurs factures, ce qui n’aurait pas été le cas si la partie fixe (R2) avait été dominant. Le contrat de DSP a fixé dans le Compte d’exploitation prévisionnel que la partie variable (R1) représenterait 60 % et la partie fixe (abonnement R2) seulement 40%.

Mais les économies d’énergies dans le chauffage urbain sont maintenant dominées par le changement climatique plus que par l’évolution des isolations thermiques… Donc le déséquilibre entre R1 et R2 devient plus problématique. Dès que la saison de chauffe est froide, la CCIAG fait des résultats très importants et au contraire dès que la saison est clémente le résultat est beaucoup moins bon, à terme cela va poser des problèmes d’équilibre de ce service public.

C’est le bon moment pour réexaminer la structuration de la tarification de ce service public, d’autant que ce service public désormais géré dans l’intérêt public, donne enfin satisfaction.

Mots-clefs : , , ,

Le commentaires sont fermés.