Réforme des impôts locaux : les fautes de Macron

Publié le 16 octobre 2020

Le secrétaire général de l’Association des maires de France, Philippe Laurent maire UDI de Sceaux et spécialiste des finances locales, a donné une interview à La Gazette des communes dénonçant la politique gouvernementale :

« Bercy a donc gagné. Dans quelques années, les impôts locaux auront disparu. Ils auront été remplacés par des dotations, dont une partie indexée sur le produit d’impôts nationaux. Cette indexation, très maigre consolation, ne durera pas : déjà, en 1979, la création de la dotation globale de fonctionnement prévoyait que celle-ci représentait une partie de la TVA collectée par l’Etat. Mais l’Etat a considéré que la progression était trop rapide : quelques années plus tard, la norme annuelle de variation de la DGF était fixée par la loi annuelle de finances, sans plus aucun rapport avec le produit de TVA.

Les engagements de l’Etat français ne valent jamais plus d’une année. Selon M. Macron, dont le soutien à Bercy en la circonstance a été total, la nouvelle donne correspond à l’application du modèle allemand. C’est faux. En Allemagne, le partage des impôts nationaux ne concerne que les Länder, et pas les communes qui continuent de percevoir des impôts locaux. Et ce partage s’accompagne d’un droit de véto du Sénat allemand sur les quotités réparties, qui oblige à la négociation entre partenaires à poids politique et économique comparable. Rien de tel, et de loin, en France !

Les budgets locaux seront donc alimentés par des dotations décidées à Bercy, et peu importe leur calcul puisque celui-ci est exclusivement déterminé par le gouvernement, voire le ministère des Comptes publics aux ordres directs de l’Elysée, avec un passage anecdotique par un parlement déconsidéré.

Ces dotations elles-mêmes sont de plus en plus souvent fléchées vers les dépenses que les préfets estiment souhaitables. Les budgets locaux deviennent ainsi des budgets annexes de celui de l’Etat, et les maires deviennent de simples sous-traitants de l’administration centrale. Cette évolution, à l’œuvre depuis le traité de Maastricht qui a rendu l’Etat responsable aux yeux de l’Europe de l’ensemble des finances publiques, a été accélérée et encouragée par M. Macron, qui commet là au moins trois fautes majeures :

Une faute économique : la justification du contrôle total des finances locales par la maîtrise des finances publiques n’a plus de pertinence depuis que la digue maastrichienne a sauté à l’occasion de la crise sanitaire. Les collectivités locales, et donc les services et les investissements publics locaux, restent pourtant sacrifiés dans la « relance », contrairement au discours officiel qui utilise le mot-valise « territoire », mais ne nomme jamais les acteurs institutionnels.

Une faute démocratique : la fin des impôts locaux entraîne la disparition de la responsabilité fiscale, donc politique, des assemblées locales élues au suffrage universel direct. Le fondement de la démocratie est le consentement à l’impôt comme moyen de financer les charges communes, le tout décidé par une instance élue. S’il s’agit d’appliquer partout, et dans tous les domaines, la politique définie « en haut », autant supprimer l’élection et nommer des exécutants. C’était le cas sous l’Empire.

Une faute politique : en concentrant toute la responsabilité du fonctionnement du pays sur ses propres décisions, M. Macron endosse aussi toutes les critiques et rend finalement les élus « irresponsables ». Il fait disparaître les contre-pouvoirs. Il devra en payer le prix politique. »

 Il rejoint ce que déclarait André Laignel, président du Comité des finances locales le 1er octobre dans une interview à maire-info : « Le gouvernement poursuit l’amputation de la fiscalité locale »

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