
La France devra transposer d’ici la fin de l’année 2021 la directive relative aux personnes qui signalent des violations du droit de l’Union. L’Assemblée plénière de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) a rendu un avis le 24 septembre 2020 sur la transposition en droit interne de la directive européenne n° 2019/1937 du 23 octobre 2019 relative aux lanceurs d’alerte.
Voici un résumé de l’avis de la CNCDH : « En raison des améliorations qu’elle renferme, tant pour le statut du lanceur d’alerte, que pour la simplification de la procédure de signalement, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) recommande au législateur d’assurer une transposition de la directive qui, d’une part, élargisse le champ de l’alerte aux personnes morales, notamment les organisations syndicales et à des associations et, d’autre part, s’applique à l’ensemble des faits visés par la loi dite « Sapin 2 », y compris les menaces graves pour l’intérêt général. Par ailleurs, la directive réserve aux États membres une marge d’appréciation pour certains aspects : la CNCDH invite le législateur à retenir des options favorables à la protection effective des lanceurs d’alerte (par exemple, l’octroi d’une assistance financière et psychologique). Bien que la directive ne l’évoque pas, la CNCDH estime que les lanceurs d’alerte de nationalité étrangère devraient également bénéficier du droit d’asile. »
Rappels : le lanceur
d’alerte est une personne signalant un fait illicite ou des risques d’atteinte
à l’intérêt général dont elle a pris connaissance dans l’exercice de ses
fonctions. Il peut s’agir d’infractions de corruption, de trafic d’influence,
de concussion, de prise illégale d’intérêt, de détournement de fonds publics ou
de favoritisme. Le lanceur d’alerte est bien souvent employé par l’entreprise
ou la personne dont il dénonce les agissements. Il est donc particulièrement
vulnérable aux représailles de son employeur et notamment aux risques de
sanctions disciplinaires ou de licenciement.
La loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte
contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, dite « Loi
Sapin 2» a renforcé la protection du lanceur d’alerte. Le texte crée
notamment une agence nationale de lutte contre la corruption dont le rôle est
de protéger les lanceurs d’alerte contre les représailles (sanction
disciplinaire, licenciement, baisse de salaire, etc.) et de préserver leur
anonymat lors du signalement. Ce texte prévoit que, sauf danger grave ou
imminent, le salarié doit dans un premier temps avertir son supérieur
hiérarchique. En l’absence de diligences de ce dernier, le salarié peut alors signaler
les faits à l’autorité judiciaire ou administrative ou aux ordres
professionnels.
La directive européenne encourage les Etats à aller au-delà des normes
minimales communes en créant un régime harmonisé au sein de l’Union européenne
propre à garantir une protection effective des lanceurs d’alerte. La directive
prévoit d’accorder la protection du lanceur d’alerte au « facilitateur »,
personne physique qui aide un auteur de signalement au cours du processus de
signalement dans un contexte professionnel et dont l’aide devrait demeurer
confidentielle.
Alors que l’information de
l’employeur constitue un préalable obligatoire à l’heure actuelle en droit
français, elle n’est envisagée qu’à titre facultatif dans la directive, le
lanceur d’alerte pouvant s’adresser directement à l’autorité en charge du
traitement des alertes. Selon la CNCDH cette évolution facilitera
incontestablement les alertes. Elle recommande donc de supprimer cette
obligation de signalement interne à l’employeur.
La CNCDH estime opportun d’élargir le statut de facilitateur à toute personne
morale, notamment syndicat, association à but non lucratif, fondation afin de
permettre d’apporter à la personne physique auteur du signalement une aide, un
soutien financier et une protection.
Mots-clefs : droits humains, Europe, justice