L’état d’urgence sanitaire prorogé jusqu’au 10 juillet 2020

Publié le 15 mai 2020

Le 9 mai, le parlement a adopté la prolongation de l’état d’urgence sanitaire jusqu’au 10 juillet inclus. Cette loi n’a pas pu être promulguée à temps par le Président de la République à temps ; le Conseil Constitutionnel ne l’a que partiellement validée le 11 mai, il a été sollicité en urgence le 9 mai par le Président de la République et le Président du Sénat et le 10 mai par des députés et des sénateurs.

La loi est parue au Journal officiel le 12 mai, sans son article 13 déclaré non conforme à la Constitution.

« Le Conseil constitutionnel a censuré comme méconnaissant la liberté individuelle l’article 13 de la loi déférée qui a pour effet, à compter de l’entrée en vigueur de la loi déférée, de laisser subsister, au plus tard jusqu’au 1er juin 2020, le régime juridique actuellement en vigueur des mesures de mise en quarantaine et de placement et maintien à l’isolement en cas d’état d’urgence sanitaire. »

Ce qui posait le plus de questions dans ce projet de loi étaient les mesures de traçage et de recueil des contacts des personnes infectées qui portaient atteintes aux droits et libertés individuelles.

Le Conseil Constitutionnel a censuré deux dispositions de la loi concernant l’isolement prolongé des malades sans intervention d’un juge et le large accès au dispositif de traçage de leurs contacts.

Les juges constitutionnels ont censuré les modalités de mise en quarantaine et de placement en isolement ainsi que, pour les organismes chargés de l’accompagnement social, l’accès aux données du système d’information destiné au « traçage » des personnes atteintes par le virus.

Sur le système de traçage des malades et de leurs contacts, le Conseil constitutionnel a validé la liste des professionnels et institutions ayant accès aux données ainsi recueillies, mais en revanche a censuré l’accès à ces données aux organismes assurant l’accompagnement social des intéressés (comme les CCAS). Il a en effet considéré que « s’agissant d’un accompagnement social qui ne relève pas directement de la lutte contre l’épidémie, rien ne justifie que l’accès aux données à caractère personnel traitées dans le système d’information ne soit pas subordonné au recueil du consentement des intéressés ». En conséquencela phrase « les organismes qui assurent l’accompagnement social des intéressés dans le cadre de la lutte contre la propagation de l’épidémie peuvent recevoir les données strictement nécessaires à l’exercice de leur mission » a été retirée de l’article 11 de la loi.

Le conseil a formulé une réserve d’interprétation sur le fait que l’exigence de suppression des noms et prénoms des intéressés, de leur numéro d’inscription au répertoire national d’identification des personnes physiques et de leur adresse – dans les parties des traitements informatiques ayant uniquement pour finalité la surveillance épidémiologique et la recherche contre le virus – doit également s’étendre aux coordonnées de contact téléphonique ou électronique des intéressés.

Il a formulé deux autres réserves sur le fait qu' »il appartiendra au pouvoir réglementaire de définir des modalités de collecte, de traitement et de partage des informations assurant leur stricte confidentialité » et sur le fait que le recours à d’éventuels sous-traitants « doit s’effectuer en conformité avec les exigences de nécessité et de confidentialité mentionnée par la présente décision ».

Sur la responsabilité pénale, notamment des élus, le conseil Constitutionnel s’est permis un peu d’ironie vis-à-vis du législateur, en indiquant que cela n’apportait rien de nouveau :

 « S’agissant des conditions d’engagement de la responsabilité pénale en cas de catastrophe sanitaire, le Conseil constitutionnel a jugé que les dispositions du paragraphe II de l’article 1er de la loi déférée rappellent celles de droit commun et s’appliquent de la même manière à toute personne ayant commis un fait susceptible de constituer une faute pénale non intentionnelle dans la situation de crise ayant justifié l’état d’urgence sanitaire. Dès lors, elles ne méconnaissent pas le principe d’égalité devant la loi pénale. Elles ne sont pas non plus entachées d’incompétence négative. »

A propos de l’état d’urgence sanitaire, voici un rappel des fondamentaux :

« S’agissant du régime de l’état d’urgence sanitaire, le Conseil constitutionnel a jugé que la Constitution n’exclut pas la possibilité pour le législateur d’en prévoir un. Il lui appartient, dans ce cadre, d’assurer la conciliation entre l’objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé et le respect des droits et libertés reconnus à tous ceux qui résident sur le territoire de la République. Parmi ces droits et libertés figurent la liberté d’aller et de venir, composante de la liberté personnelle, protégée par les articles 2 et 4 de la Déclaration de 1789, le droit au respect de la vie privée, qui découle de cet article 2, la liberté d’entreprendre qui découle de cet article 4, ainsi que le droit d’expression collective des idées et des opinions résultant de l’article 11 de cette déclaration. »

« Par une réserve d’interprétation, le Conseil constitutionnel juge que, dès lors, ces dispositions ne sauraient, sans méconnaître les exigences de l’article 66 de la Constitution, permettre la prolongation des mesures de mise en quarantaine ou de placement en isolement imposant à l’intéressé de demeurer à son domicile ou dans son lieu d’hébergement pendant une plage horaire de plus de douze heures par jour sans l’autorisation du juge judiciaire. »

Pour lire le communiqué complet, cliquer ici.

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