Rapport d’information de deux députés sur les « métiers du lien »

Publié le 3 juillet 2020

Un rapport d’information, présenté au nom de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, a travaillé sur « Les métiers du lien ». Ce travail est présenté par B. Bonnell, député (LREM) du Rhône et par F. Ruffin, député (France insoumise) de la Somme. Ce rapport contient deux introductions séparées, mais les conclusions et les propositions sont communes. Ce rapport traite de quatre grands métiers : assistante maternelle, accompagnateur d’enfant en situation de handicap, animateur périscolaire et auxiliaire de vie sociale. Les 43 propositions ne sont pas toutes chiffrées et précises et certaines sont plutôt radicales, comme celle d’interdire les services privés d’aide à domicile.

SYNTHÈSE

Le présent rapport s’intéresse à quatre métiers qui tissent du lien entre les personnes, et ce « du berceau à la tombe » : assistante maternelle, accompagnante d’enfant en situation de handicap, animatrice périscolaire et auxiliaire de vie sociale.

Nous mettons ces professions au féminin. Parce que, bien sûr, ces emplois sont très largement occupés par des femmes. Et c’est pour cette raison, à coup sûr, que ces quatre métiers souffrent d’un statut précaire, de revenus parcellaires. Le raisonnement inconscient dans la société semble : « Après tout, pendant des siècles, au foyer, elles se sont occupées gratuitement des bébés, des enfants, des malades, des personnes âgées. Aujourd’hui, on les paie un peu. Alors, de quoi elles vont se plaindre ? » Et l’éloge de la « vocation » sert alors à mieux masquer la pauvreté, la peine, l’invisibilité, de ces carrières.

Dans ces quatre métiers, en effet, le « salaire partiel » est la règle : les rémunérations y sont extrêmement faibles, la plupart du temps bien en deçà du salaire minimum mensuel. Ce salaire partiel correspond à un « temps partiel », qui occupe en fait les journées, découpées entre un quelques heures le matin et autant le soir, avec une énorme amplitude. Et sans que ne soient comptés les temps d’auto formation, de coordination, de prise de poste, d’échanges entre collègues, de préparation, de déplacements, ou simplement de relation humaine avec les personnes et leur famille. C’est la clé : comment est compté leur temps de travail ? Doit-on rémunérer le seul temps d’intervention ? Qu’en serait-il alors pour le journaliste, le pompier, le député ? Par ailleurs, les formations, à la fois initiales et continues paraissent insuffisantes, n’offrant pas une qualification, laissant la professionnalisation dans le flou. Et avec, faute de structuration du métier, une pénibilité physique et psychique importante, des taux d’accident du travail supérieurs au bâtiment.

L’heure est venue de sortir ces métiers des « vies de galère, salaires de misère ». Toutes les études montrent que ces métiers seront des gisements d’emplois : la quantité sera là, mais pour quelle qualité ? Quelles conditions de travail, quels revenus, quels statuts ? dignes du travail qu’elles effectuent ? Jusqu’à présent, les politiques publiques ont échoué à les structurer, quand elles ne les ont pas déstructurées davantage…

Les propositions contenues dans le rapport sont nécessaires : hausse des rémunérations, revalorisation des grilles salariales, prise en compte de l’ensemble du temps de travail effectué. Il convient, également, de modifier l’organisation du travail afin de leur garantir des temps pleins, avec du collectif, des moments d’échanges, de formation. Et aussi, que la relation entre la salariée et la personne aidée, souvent purement interpersonnelle, s’opère davantage en équipe. Avec, enfin, des statuts protecteurs, des perspectives de carrière, l’accès à la formation continue – que les rapporteurs privilégient par rapport à l’instauration de barrières à l’entrée. Le présent rapport préconise, par exemple, l’instauration d’une formation qualifiante pour toutes les salariées (qui serait, bien sûr, spécifique à chaque métier), dans un délai d’un an après leur prise de fonction.

Il le faut désormais.

Il le faut pour des raisons féministes, on l’a dit. Il le faut pour des raisons sociales, avec des centaines de milliers de travailleuses à sortir de la pauvreté. Mais il le faut, également, pour des raisons écologiques : la modernité, encore plus que le numérique, ce sont ces métiers du lien. C’est par là que se fera le progrès humain, plus que par les biens. Ces femmes sont les héroïnes de la transition.

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