Histoire d’eau entre Grenoble et la Métro

Publié le 1 octobre 2021

On a encore assisté lors du Conseil de la Métro du 24 septembre à une nouvelle attaque de la droite contre la ville de Grenoble à propos d’une supposée dette que la ville ne voudrait pas payer concernant le service de l’eau potable dont la compétence a été transférée à la métropole en 2015.

Une délibération du 20 décembre 2019 de la Métro, faisait état du dossier ; elle estimait que la ville devait rembourser 1,5 M€, mais ajoutait que si des éléments nouveaux étaient avancés, la question serait rediscutée. La Ville a apporté des éléments nouveaux contestant cette somme et démontrant que le principe « l’eau paye l’eau » était respecté et donc les usagers du service n’avaient pas été lésés.

Il faut préciser qu’il ne s’agit pas d’un oubli de transfert financier comme cela s’est passé avec une autre commune, mais d’un calcul complexe de l’ensemble des charges supportées par le budget principal de Grenoble pour faire revenir le service public de l’eau potable de Grenoble dans une gestion publique après la privatisation illégale et par corruption en 1989 par M. Carignon, qui s’est enrichi personnellement directement par cette corruption.

Le sujet est complexe, mais ce n’est pas une raison pour le dénaturer en lui accolant une explication simpliste et erronée comme le font des élu-es qui n’y connaissent rien. 

Dans la délibération de décembre 2019 de la Métro, les 1,5 M€ avancés par la Métro correspondent au seul montant du boni de liquidation de la société d’économie mixte, Société des Eaux de Grenoble (SEG) revenant à la Ville en tant qu’actionnaire à 67% de cette SEM (Le boni total est arrêté à 2,285 M€, voir délibération du 21 octobre 2013 de la Ville)

Le boni de liquidation représente l’excédent financier qui subsiste suite à l’apurement du passif par la vente des actifs lors de la liquidation d’une société. C’est le budget principal de Grenoble qui a participé à l’achat de l’immeuble propriété de la SEG pour 1,65 M€ et a permis la réalisation de l’actif avant liquidation.

La Métro estime que la somme de 1,5 M€ devrait revenir au service public de l’eau. Cette SEM SEG résulte d’un montage complexe fait en 1996 par ceux qui voulaient maintenir la Lyonnaise des Eaux (devenue Suez ensuite) malgré la corruption et contre l’engagement électoral de 1995 de remunicipaliser le service public de l’eau (et dont certains sont aujourd’hui administrateur de filiale de ce groupe).

Pour l’ADES, comme les actions de la Ville dans la SEG ont été apportées par le budget principal, lors de la liquidation de cette société, l’éventuel boni de liquidation revient légalement aux actionnaires donc au budget principal de la Ville et pas au service de l’eau. Le budget principal de la commune se remboursant ainsi de l’apport en capital à la SEG, ce qui est tout à fait normal.

Donc en l’état du dossier les 1,5 M€ ne sont pas à considérer comme une dette de la Ville au service public de l’eau, à son budget annexe.

Par contre il serait bien vu de la part des élu-es métropolitains de décider que le budget de la Métro rembourse le budget annexe de l’assainissement des 3 M€ que Didier Migaud avait « piqué » dans le budget assainissement pour équilibrer le budget 2006 à cause du coût du stade qui explosait. Les usagers avaient été effectivement spoliés par ce holdup.

Reste à la Ville et à la Métro à se mettre d’accord pour clôturer rapidement ce dossier qui a déjà trop tardé et qui est utilisé par de nombreux élu-es qui n’y connaissent rien, dans un Grenoble Bashing incessant et politicien. D’autant plus qu’il y a encore de nombreuses charges de centralité qui sont portées par la ville-centre et qui devront être pris en charge par la Métropole (voir le récent rapport de la chambre régionale des comptes sur la métropole).

Au lieu de poursuivre cette instrumentalisation purement politicienne (tous contre la ville-centre), l’ADES propose que la Ville et la Métro demandent une médiation au tribunal administratif pour savoir quelle doit être la destination de cette somme de 1,5 M€.

L’ADES rappelle que Grenoble a depuis plus d’un siècle créé un service public de l’eau potable d’une grande qualité et d’une valeur patrimoniale inestimable, notamment par la création et la gestion des captages de Rochefort qui permettent à un coût inégalé de servir une eau naturellement pure et assure à la ville et maintenant à l’agglomération une sécurité d’approvisionnement que beaucoup de collectivités nous envient.

Les usagers de ce service métropolitain ne peuvent que se réjouir de pouvoir profiter d’un tel bien commun qui a été remunicipalisé grâce à nos actions de 1989 à 2000, contre les corrupteurs et les corrompus, et qui a été cédé gratuitement en toute propriété par la ville à la Métro le 1er janvier 2015, comme l’imposait la loi. Et la bonne gestion du service de l’eau de Grenoble a permis à la régie métropolitaine de recevoir le résultat du service de l’eau grenoblois qui s’est monté à 8 M€.

Rappels des coûts et des dégâts de la corruption concernant le service de l’eau de Grenoble

Les impôts cachés dans les factures d’eau :

Mais ce n’est pas tout, car les Grenoblois ont été obligés de payer des impôts cachés dans leurs factures d’eau suite à la privatisation du service de l’eau à la Lyonnaise des Eaux, obtenue par corruption. Chaque année la COGESE (filiale de la Lyonnaise) versait 15 millions de francs à la ville pour redresser ses finances, elle se remboursait par l’augmentation des factures aux usagers. En plus le maire corrompu transférait d’importantes sommes du budget annexe de l’eau au budget principal pour renflouer les caisses de la ville. Entre 1983 et 1994 le budget annexe de l’eau a trop versé au budget principal, sans aucune justification, la somme de plus de 100 millions de francs !!!

La Chambre Régionale des Comptes dans ses observations du 21 novembre 1995, sur la gestion du service de l’eau et de l’assainissement durant la période 1989 à 1994, se prononçait sur la privatisation issue de la corruption : « La délégation de service public a été détournée de son objectif normal en ce sens qu’elle a été utilisée comme un instrument permettant à la commune de se procurer des fonds dont elle avait besoin pour redresser en réalité sa situation financière propre. 

Et la Cour de cassation du 08 avril 1999 résumera l’affaire CARIGNON en un paragraphe : « La concession du service de l’eau de la ville de Grenoble a été attribuée par [le maire] Alain CARIGNON à la société COGESE (…) uniquement parce qu’elle était en mesure de [lui] procurer les dons et avantages personnels promis ; [par ailleurs] la chambre régionale des comptes [conclut en 1995 que] la commune a accepté de fournir au concessionnaire des moyens beaucoup plus importants que ceux employés auparavant et [qu’]elle a consenti à ce que les usagers supportent au bénéfice de la société COGESE des augmentations de tarifs programmées à l’avance et non justifiées dans les contrats conclus ; (…) les agissements des prévenus sont en lien avec [les] augmentations de tarifs. » Et tout dernièrement, le juge Courroye sur France Inter rappelait certains détails du comportement du maire corrompu.

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