Hommage à Michel Garcin

Publié le 19 novembre 2021
©France Bleu

Le 15 novembre un public nombreux a assisté à un hommage émouvant rendu à Michel Garcin lors de la cérémonie aux Pompes Funèbres Intercommunales. De nombreuses prises de paroles par la famille, les soignants, les amis, ont rappelé cette vie très remplie malgré la maladie précoce d’Alzheimer.

Parmi les nombreux hommages, nous retiendrons ce qui nous a reliés directement à Michel Garcin : l’affaire de la corruption à Grenoble lors de la vente du service de l’eau de Grenoble à la Lyonnaise des Eaux, période qui a été rappelée par Philippe Descamps, journaliste et ami de Michel.

Voici un extrait de l’hommage public rendu par Philipe Descamps :

« Nous avons véritablement fait connaissance quand Michel était à Radio France Isère et que je travaillais à France 3. Alain Carignon était maire de Grenoble, président de l’agglomération et du département, ministre. Il draguait ou terrorisait tous les journalistes et leurs chefs, sauf une toute petite poignée qui ne voulait pas se résoudre à faire l’impasse sur la corruption. Grenoble rejouait « Main basse sur la ville », et nous n’aurions pas dû en parler.

L’ampleur de la corruption était bien plus importante que ce que nous avions pu l’un et l’autre imaginer. Hommes politiques de tous bords, policiers et magistrats étaient touchés. Michel en fut bouleversé.

Le Dauphiné libéré étant des plus discrets sur les affaires, nous avions la primeur pour « sortir » des informations. Une saine rivalité nous animait. Chacun son boulot, nos échanges étaient plutôt pour se redonner le moral face à tant d’adversité de la part du personnel politique, et de complaisance de nos confrères vis-à-vis d’eux. Alain Carignon était ministre de la Communication, et se considérait comme le ministre de « tutelle » du service public de l’audiovisuel, qui nous employait tous les deux. Arrivés à un certain niveau de découverte, nous ne pouvions plus reculer.

Voir un ministre en prison (en octobre 1994) fut pour tous les journalistes une surprise. Pour Michel, ce fut aussi un choc. Nous avions raison, nous n’avions pas raconté des bêtises. Les faits étaient même bien plus graves que les soupçons que nous avions été les premiers à émettre. Mais Michel n’en revenait toujours pas que des êtres humains puissent être aussi tordus et cupides. Il y a quelque chose de profondément humain et moral chez Michel, qui ne collait pas avec la mentalité des années 90, les années Tapie.

Malgré la pression qui reposait sur ses épaules, Michel fut toujours solide. J’ai pu m’en rendre compte lors de la préparation des élections municipales de juin 1995. France Inter voulait faire un « Téléphone sonne » sur les affaires. Michel recommande de m’inviter. Une demi-heure avant l’antenne, l’animateur de l’émission, Alain Bédouet, reçoit un coup de fil de Paris. Silence, il faut m’éjecter du studio, trop sulfureux ! Michel et Alain Bédouet ne se sont pas laissé intimider, et j’ai pu décrire le système grenoblois à l’antenne d’Inter… À l’automne, le jugement est tombé, 5 ans de prison. Le maire de Grenoble retournerait bien en cabane, mais la presse relayait encore complaisamment ses mensonges, limitant l’affaire à du financement politique. Il y avait bien des frais de loisir, de nombreux voyages personnels, de nombreux avantages personnels payés par des entrepreneurs en échange du marché de l’eau. Nous avons alors décidé de publier le jugement du tribunal correctionnel de Lyon, pour que les Grenoblois puissent être correctement informés. »

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