Retour sur la notion de compétence du conseil municipal

Publié le 3 décembre 2021

Il n’est pas inutile de revenir sur la définition de la compétence communale, puisqu’une députée s’interroge sur la légalité de la construction d’un abri qui sera notamment utilisé par des gilets jaunes ayant participé à sa construction. Et un nouveau système d’interpellation citoyenne exige pour y entrer que la demande soit de compétence communale (voir délibération du 14 juin 2021), ce qui est la moindre des choses.

La commune est une collectivité territoriale qui, à la différence du département et de la région, a la compétence générale. C’est-à-dire que le conseil municipal gère les affaires de la commune, donc tout ce qui est d’intérêt communal et qui n’est pas donné par la loi à la compétence exclusive d’une autre institution, (Etat, collectivité, personne publique ou privée ayant une mission de service public…). La compétence du conseil municipal est donc très large mais ne peut pas venir empiéter celles des autres et tout acte qui n’est pas de sa compétence est considéré par la justice comme illégal.

Par exemple, le conseil municipal ne peut pas délibérer sur une demande de permis de construire puisque la loi (le code de l’urbanisme) donne cette compétence en exclusivité au maire, qui arrêtera pourtant le permis de construire au nom de la ville. Sauf s’il s’agit d’un permis de construire en faveur de la ville, ce qui impose au conseil municipal de délibérer pour autoriser la signature par le maire ou par un conseiller municipal dans le cas où le maire aurait un intérêt personnel à la construction.

Autre situation : les élu-es membres d’un conseil d’administration d’une Société d’Economie Mixte (SEM), le sont au nom du Conseil municipal, seul ce dernier peut leur donner un mandat pour agir au nom de la ville dans le conseil d’administration ; encore faut-il que le mandat soit de compétence municipale. Tout dépend des contrats que la ville a avec la SEM. S’il y a une délégation de service public de la ville, le conseil municipal a compétence pour en surveiller le déroulement et éventuellement discuter des tarifs contenus dans le contrat. Mais si la SEM a la gestion d’activités définies par une loi autre que celles codées dans le Code général des collectivités territoriales, le conseil ne pourra pas donner de mandat à ses représentants sur ces activités. Ces derniers auront à définir en conseil d’administration la politique de la société conformément aux lois qui s’imposent (code de commerce notamment), à ses statuts et à ses activités pour rendre les meilleurs services aux usagers ou habitants.

Est-il d’intérêt communal de construire dans le cadre d’un COP (Chantier Ouvert au Public) un abri sur un rond-point ?  Rien ne l’empêche, puisqu’il s’agit d’un chantier public dont le maitre d’ouvrage est la ville mais qui a un aspect particulier puisqu’il est réalisé en collaboration avec des habitants ou associations de Grenoble, pour une utilisation ouverte à toutes et tous.

« Les COP sont un outil simple, efficace et convivial qui vous permettra de retrouver d’autres bénévoles ayant à cœur de faire vivre leurs quartiers dans une ambiance de coopération. »Chantiers – Grenoble.fr

Le COP Pierre et Marie Curie a été proposé par le Collectif des Gilets Jaunes Unitaires du rond-point Pierre et Marie Curie à Grenoble. Il s’agit donc d’un abri réalisé par la ville avec la participation de ce collectif. Il ne s’agit pas d’un bâtiment privé réservé à ce collectif, mais d’un abri municipal ouvert à tous les habitants.

Qu’il soit préférentiellement utilisé par celles et ceux qui ont participé à sa réalisation, ne pose pas de problème de légalité, contrairement à la crainte de la députée E. Chalas qui a souvent du mal à comprendre comment fonctionne une commune. Libre à elle cependant de faire un recours au tribunal administratif, elle a encore un peu de temps pour cela avant de terminer son mandat de député.

Deuxième cas : une association demande à la ville d’intervenir auprès d’un bailleur social car elle estime qu’il ne gère pas correctement les locataires. Or la loi donne l’exclusivité de la gestion locative au bailleur, dans le code de la construction et de l’habitation (CCH) et même si ce dernier a pour actionnaire majoritaire la ville, le conseil municipal ne peut pas prendre une délibération touchant à la gestion locative car il n’en a pas la compétence. Cette interpellation doit donc être retirée du système prévu par la délibération du 14 juin 2021, elle y a été autorisée par erreur.

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