L’imposition locale est particulièrement injuste et Macron a amplifié ce fait

Publié le 17 février 2023

On sait que l’impôt (la contribution commune) est une nécessité démocratique fondamentale car tout le monde doit participer aux dépenses publiques dans une démocratie. L’impôt n’est acceptable que si il est juste, c’est à dire s’il dépend réellement des revenus des ménages et il est préférable qu’il soit progressif (les plus riches doivent payer proportionnellement plus que les plus pauvres).

C’est ce que rappelle l’article 13 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 qui fait partie de notre Constitution : « Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés. »

L’imposition locale a été définie à la Révolution française : il y était admis que la mesure de la valeur foncière était liée au revenu du propriétaire, mais depuis plus d’un siècle ce n’est plus du tout le cas (notamment par l’héritage et le développement du capitalisme financier), mais l’imposition locale est toujours déterminée sur ces mêmes bases. Il aura même fallu attendre le gouvernement Jospin en 2000 pour que la taxe d’habitation soit un peu liée au revenu du ménage.

Les impôts locaux (taxe d’habitation et taxe foncière) sont fondés sur la valeur locative du bien. Or cette valeur a été redéfinie en fonction d’une réalité des biens loués datant d’avant 1970 ; elle est fonction de la surface corrigée et non de la surface réelle, la valeur du mètre carré est la même dans toute la commune et ne dépend que de la classification du logement (qui dépend de la qualité de la construction). La surface corrigée incorpore de nombreux éléments de confort des logements qui ont beaucoup évolués au cours du siècle dernier.

Or la valeur locative réelle des logements dans Grenoble dépend énormément de leur localisation et la Ville s’est beaucoup développée depuis 1970 (par exemple la construction de la Villeneuve) et la surface corrigée des nouveaux immeubles est très supérieure à celle des anciens qui n’ont pas toujours corrigé les éléments de confort qui n’existaient pas à l’époque. Pour une même surface et une même classification des immeubles la taxe foncière est supérieure à la Villeneuve qu’au centre-ville et à l’Ile Verte. Ce qui n’a plus rien à voir avec la valeur locative réelle dans les quartiers de la ville.

Il était prévu que tout cela soit prochainement changé, que la valeur locative corresponde à la surface réelle et au prix du marché locatif durant l’année 2023 dans les différents quartiers de la ville et que le logement social soit avantagé. La mise en place était prévue pour 2026.  Or la loi de finances 2023 a repoussé cette mise en place de deux ans, ce qui laisse à penser qu’encore une fois la réforme ne sera pas faite comme dans les années 1990 où le gouvernement a reculé pour une première réforme qui allait un peu dans ce sens.

La décision unilatérale de Jupiter Macron de supprimer la taxe d’habitation amplifie le caractère injuste de l’impôt local. En effet la taxe d’habitation était ajustée à la composition de la famille et un peu au niveau des revenus pour une partie importante des ménages. Il y avait de nombreuses exonérations et d’importants dégrèvement pour les revenus modestes. Par contre la taxe foncière n’est pas fonction du revenu et il y a très peu d’exonérations et quelques dégrèvements très faibles.

Maintenant qu’il n’y a plus de taxe d’habitation pour les résidences principales, le seul impôt qui reste à la disposition du conseil municipal est la taxe foncière.

Or pour les finances de Grenoble il y a nécessité absolue d’augmenter fortement les recettes de fonctionnement pour passer l’année 2023, car les dépenses imposées à la Ville (inflation générale, crise des prix de l’énergie, décisions gouvernementales…) ont augmenté de façon vertigineuse. 

Certain.es élu.es de l’opposition municipale estiment également qu’il faudrait  augmenter le taux de taxe foncière d’au moins 17% pour éviter la mise sous tutelle de la commune par le préfet.

La majorité municipale a annoncé, elle, dans le rapport d’orientation budgétaire de janvier une hausse forte de 25 % pour équilibrer les finances, augmenter les investissements pour préparer l’avenir menacé par le changement climatique.

Consciente de l’injustice de cet impôt, elle prévoit cependant de mettre en place un bouclier fiscal et climatique (de 11 millions d’euros) qui permettra d’atténuer le caractère injuste de cet impôt en adoptant différentes mesures susceptibles d’alléger certaines dépenses pour les ménages précaires et les classes moyennes, notamment les propriétaires occupants aux faibles ressources.

A Grenoble il y a seulement 38 % de propriétaires occupants une résidence principale. Cela veut dire que les locataires (62%) qui sont très majoritaires ne payeront plus d’impôt local et que tout repose sur les propriétaires. La démocratie locale est bien mise à mal et au lieu de corriger les profondes injustices concernant les impôts locaux, Macron les a encore accentuées.

A nos yeux, le débat concernant l’augmentation du taux de la taxe foncière devrait se focaliser sur le bouclier social et climatique pour essayer d’inventer les meilleures solutions corrigeant un peu cette injustice.  La municipalité en a proposé un certain nombre, les idées des citoyens peuvent venir renforcer les propositions ou les faire évoluer à l’avenir et en proposer d’autres.

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