L’application de la loi SRU sur le logement social : réflexions de la Cour des Comptes

Publié le 19 mars 2021

Le 10 mars, suite à la demande de la commission des finances du Sénat, la Cour des Comptes a enquêté sur l’application de l’article 55 de la loi sur la solidarité et le renouvellement urbain (SRU). Cet article impose l’obligation pour les 2 000 communes les plus importantes de disposer d’un taux minimum de logements sociaux de 20 ou 25 % par rapport à l’ensemble des résidences principales.

Elle note que ce dispositif a incontestablement eu un effet positif sur la production de logements locatifs sociaux, avec plus de 210 000 logements construits entre 2017 et 2019 dans les communes soumises à la loi et un objectif triennal atteint à 107 %. Mais plus de la moitié des communes concernées se situent sous les seuils fixés et doivent verser un prélèvement sur leurs recettes, avec l’obligation d’atteindre le pourcentage prévu par la loi d’ici 2025.

Ces résultats contrastés reflètent les difficultés et les tensions rencontrées autour de l’article 55 de la loi, dont les différents aménagements ont rendu l’application complexe et sujette à divergences d’interprétation.

La Cour propose d’anticiper l’échéance de 2025 pour corriger les faiblesses du dispositif afin de concourir plus effectivement à la mixité sociale.

« Pour préparer cette échéance de 2025, il revient aux services de l’État d’établir dès maintenant la projection la plus fine possible pour identifier et caractériser les communes susceptibles de ne pas pouvoir remplir leurs obligations. Dans la même logique, il importe de mesurer précisément l’effet des dispositions légales sur la promotion de la mixité sociale liée au logement afin d’éclairer les choix du législateur. La sensibilité, au plan local comme au plan national, de ce sujet justifie que la décision d’adapter ou non le dispositif de l’article 55 ne soit prise qu’à l’issue de cet état de lieux. Au titre des adaptations possibles est parfois évoqué le passage d’une appréciation par stocks – c’est-à-dire en pourcentage – de logements sociaux à une gestion par flux – c’est-à-dire en nombre de logements sociaux créés.

Un tel changement reviendrait cependant à renoncer à la finalité même de la loi SRU, en abandonnant l’objectif de développement de la mixité sociale. Une autre voie serait de retenir une application de la loi qui prenne mieux en considération les spécificités des différentes communes. Cela peut passer par l’admission de nouvelles catégories de logements dans l’inventaire des logements sociaux ou encore par l’extension des cas d’inconstructibilité de nature à fonder une exemption, au risque cependant d’accroître la complexité du dispositif. Mais au-delà de ces dispositions à caractère général, une application différenciée pourrait être conçue selon les collectivités, dans une recherche d’équilibre entre cohérence nationale et contexte local. Celle-ci supposerait d’aménager les procédures de concertation avec l’État afin que les contraintes et les spécificités locales puissent mieux être prises en compte. En ce sens, les « contrats de mixité sociale » créés en 2015, conclus entre le préfet et la collectivité afin « d’engager une démarche volontaire pour atteindre (…/…) ses obligations légales » en matière de logement social, pourraient être un outil adapté, sous réserve d’être suffisamment précis quant à la définition des objectifs fixés aux communes et à la mobilisation de l’ensemble des instruments disponibles. Une réflexion sur le bon niveau de concertation gagnerait également à être menée. Alors que la commune reste l’échelon de référence pour l’appréciation des seuils, les dispositions visant à une mutualisation des objectifs de production de logements à l’échelle intercommunale sont restées d’une application très limitée. L’implication plus forte des intercommunalités et le recours à la méthode contractuelle permettraient d’organiser une application différenciée de la loi. Cette application pourrait, au minimum, moduler l’horizon temporel d’atteinte d’un taux de logements sociaux, ce dernier demeurant uniforme au plan national. »

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