Environnement : régression du droit à l’information et à la participation du public

Publié le 3 septembre 2021

La loi du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique (ASAP) n’a pas fini de faire des dégâts concernant le droit à l’information et la participation du public lors des procédures environnementales précédant des projets impactant l’environnement. C’est bien de vouloir simplifier les procédures mais pas en organisant une importante régression démocratique. Le principal décret d’application de la loi est entré en vigueur le 1er août 2021, le mal est fait.

Pourtant la Commission Nationale du Débat Public, CNDP avait alerté les parlementaires sur les dangers de certaines simplifications et a réitéré ses critiques après la publication du décret.

La Compagnie Nationale des Commissaires Enquêteurs (CNCE) avait aussi réagi aux propositions de la loi rabotant les enquêtes publiques.

Voici le communiqué du 2 août de la CNDP après la parution du décret :

« Loi « ASAP » : un été 2021 marqué par une régression du droit à l’information et à la participation du public

Depuis le 31 juillet, au beau milieu de l’été, l’entrée en vigueur du décret portant diverses dispositions d’application de la loi dite « loi ASAP » permet à des projets à fort impact environnemental d’être décidés, sans obligation d’en informer le public et d’en débattre.

La CNDP, dans un avis adopté à l’unanimité, avait alerté en mars dernier sur ce projet de décret qui impose une régression sans précédent du droit à l’information et à la participation du public

L’autorité indépendante avait déjà souligné que la loi « ASAP » restreint les droits du public puisqu’elle divise par deux le délai pendant lequel il peut demander l’organisation d’une concertation sur un nouveau projet (droit d’initiative) et qu’elle privilégie des procédures et des modalités de participation du public ne répondant pas aux exigences de neutralité et d’indépendance. Parmi celles-ci, la CNDP regrette notamment la généralisation des procédures par voie électronique (PPVE) qui excluent les publics éloignés du numérique et remplacent les enquêtes publiques. Elle constate, comme la Défenseure des droits, que ces procédures numériques sont contraires au principe d’égalité des droits.

S’agissant du projet de décret, l’autorité a alerté sur la restriction du droit à l’information et à la participation du public avec le quasi doublement des seuils de saisine de la CNDP :

  • en dessous de 230 à 300 M €, contre 150 M € jusqu’à présent, les porteurs de projet ne seront plus tenus d’en informer obligatoirement le public, ni d’en débattre avec lui pour décider de l’opportunité du projet ; il n’y aura plus d’obligation de participation continue du public jusqu’à l’enquête publique ou jusqu’à la participation par voie électronique lorsqu’elle s’y substitue ;
  • le seuil de saisine obligatoire de la CNDP par les porteurs de projets pour une concertation du public, dont la CNDP définit elle-même le calendrier et les modalités, sera rehaussé de 300 M€ actuellement à 460 ou 600 M€.

L’évaluation de l’impact de cette réforme sur les projets concernés, soumis à la CNDP entre 2018 et 2020, soit 41 projets, montre que 45 % seront juridiquement impactés. Pour près d’un tiers des projets, le public, c’est-à-dire les riverains comme toutes les personnes concernées, perd ainsi son droit d’être informé de l’existence de ces projets et d’en débattre pour décider s’il est opportun de les réaliser ou non.

« Nous assistons aujourd’hui à une régression du droit de la participation avec ce décret qui exclut du champ de la participation obligatoire un grand nombre de projets, dont certains d’intérêts nationaux tel que Paris Campus Santé », déplore Chantal Jouanno. « Alors que les publics souhaitent être davantage consultés et entendus pour peser sur les décisions qui impactent leur environnement, ils auront dorénavant la plus grande difficulté à exercer leur droit puisque les délais d’exercice de celui-ci ont été divisés par 2. Ce décret va à l’encontre de leur aspiration », conclut la présidente de la CNDP. »

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