Le préfet défère au tribunal administratif l’arrêté « anti-remise à la rue »

Publié le 7 juin 2019

Le 13 mai au Conseil municipal avait été pris un vœu au maire lui demandant de prendre un arrêté « anti-mise à la rue ». Mais la formulation de l’arrêté pris depuis peut être interprétée comme s’opposant à une décision de justice, puisqu’elle peut être assimilée à un arrêté anti-expulsion. En effet l’arrêté agit au moment même de l’expulsion : « Lors de toute expulsion de domicile sur le territoire de la commune, il devra être fourni au Maire ou à son représentant qualifié la justification qu’une solution effective, décente et adaptée de logement ou le cas échéant d’hébergement, ait été proposée à la ou aux personnes intéressées. »

De nombreux arrêtés municipaux qui avaient pris la même formulation ont été annulés par la justice administrative, en effet le maire ne peut pas s’immiscer dans une procédure décidée par la justice, il en va de la séparation des pouvoirs.

Le préfet de l’Isère a décidé le 4 juin de déférer cet arrêté au tribunal administratif et de demander sa suspension. Il est probable que cet arrêté soit suspendu, puis annulé par le tribunal administratif, mais il aura permis de lancer le débat sur les mises à la rue sans solution d’hébergement qui sont trop nombreuses à Grenoble comme dans la métropole.

Cette initiative a aussi le mérite de rappeler à l’Etat ses devoirs en ce qui concerne le droit au logement qui est rappelé par de nombreux textes.

Par exemple, le Conseil Constitutionnel en date du 9 mai 2015, rappelle : « il résulte des 1er, 10ème et 11éme alinéas du préambule de la Constitution de 1946, que la possibilité pour toute personne de disposer d’un logement décent est un objectif de valeur constitutionnelle ».

Et comme l’indique l’instruction interministérielle du 22 mars 2017 relative à la mise en œuvre du plan interministériel pour la prévention des expulsions locatives, transmise aux préfets : « En tout état de cause, aucune expulsion ne devrait avoir lieu sans être assortie d’une proposition partagée avec les acteurs du territoire (collectivités, bailleurs, acteur de l’hébergement, santé…) d’hébergement avec un accompagnement social adapté. »

Voici un extrait du communiqué du préfet du 4 juin indiquant qu’il déposait un déféré au tribunal administratif contre l’arrêté du 21 mai du maire de Grenoble.

« Le préfet évoque notamment la remise en cause des pouvoirs du juge que cet arrêté implique : il n’est en effet pas dans les pouvoirs du maire de faire obstacle à la décision de justice qui constitue le fondement de la procédure d’expulsion.

Contrairement à ce qui est indiqué dans l’arrêté municipal, c’est bien au seul préfet qu’il revient d’apprécier, sous le contrôle du juge, les risques de trouble à l’ordre public liés à une procédure d’expulsion.

Cet arrêté, qui ne précise ni qui doit apporter cette solution ni les éventuelles sanctions, ne peut s’imposer aux règles fixées par la loi. »

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