Stop à StopCovid !

Publié le 1 mai 2020

L’importance de connaitre l’évolution de l’épidémie pousse le gouvernement à faire appel à des solutions technologiques qui peuvent attenter aux libertés individuelles déjà mises à mal par la loi et les ordonnances sur l’urgence sanitaire. C’est l’application appelée StopCovid qui propose d’utiliser les smartphones pour connaître les personnes qui auraient pu se trouver proche d’une personne infectée et de les avertir pour se faire tester.

Cette proposition et très contestée :

La CNIL vient de prendre une délibération le 24 avril qui s’inquiète d’une possible banalisation du traçage, demande au gouvernement des garanties sérieuses et appelle à une vigilance particulière contre la tentation du « solutionnisme technologique ».

La Ligue de droits de l’Homme s’est déclarée résolument contre dans une lettre ouverte aux parlementaires, et de nombreuses associations agissant dans le numérique disent un NON ferme à cette utilisation.

En plus il y a de grandes chances que cette disposition soit inefficace, car pas assez de volontaires pour l’utiliser et comme le disent des chercheurs : y a-t-il un sens à lancer une application qui ne serait efficace que si elle était obligatoire, mais qui susciterait, si elle était obligatoire, la défiance légitime de citoyens ?

Par ailleurs, l’application StopCovid ne peut fonctionner aujourd’hui sur les iPhones sans que leur constructeur Apple n’accepte de déverrouiller l’utilisation en arrière-plan du protocole réseau Bluetooth, ce qui n’est pas sûr du tout et ne pourra se faire dans des délais si courts. Sinon plus de 11 millions de possesseurs d’iPhone en France ne pourraient utiliser StopCovid, ce qui lui fait perdre beaucoup de son efficacité

« Les membres du collège de la CNIL se sont prononcés le 24 avril 2020.

Dans le contexte exceptionnel de gestion de crise, la CNIL estime le dispositif conforme au Règlement général sur la protection des données (RGPD) si certaines conditions sont respectées. Elle relève qu’un certain nombre de garanties sont apportées par le projet du gouvernement, notamment l’utilisation de pseudonymes.

La CNIL appelle cependant à la vigilance et souligne que l’application ne peut être déployée que si son utilité est suffisamment avérée et si elle est intégrée dans une stratégie sanitaire globale. Elle demande certaines garanties supplémentaires. Elle insiste sur la nécessaire sécurité du dispositif, et fait des préconisations techniques.

Elle demande à pouvoir se prononcer à nouveau après la tenue du débat au Parlement, afin d’examiner les modalités définitives de mise en œuvre du dispositif, s’il était décidé d’y recourir…

Dans le cas où le recours à ce dispositif serait adopté à l’issue du débat au Parlement, la CNIL émet des recommandations portant sur l’architecture et la sécurisation de l’application. Elle souligne que l’ensemble de ces précautions et garanties est de nature à favoriser la confiance du public dans ce dispositif, qui constitue un facteur déterminant de sa réussite et de son utilité.

Enfin, la Commission estime opportun que le recours à un dispositif volontaire de suivi de contact pour gérer la crise sanitaire actuelle dispose d’un fondement juridique explicite dans le droit national. Elle demande au gouvernement de la saisir à nouveau du projet d’application et du projet de norme l’encadrant lorsque la décision aura été prise et le projet précisé.

La CNIL restera particulièrement attentive aux suites de ce projet ainsi qu’aux conditions de mise en œuvre effectives du dispositif. »


Extrait de la lettre de la LDH aux parlementaires

« Le choix d’utiliser les smartphones est un facteur de discrimination qui mettra toute une partie de la population à l’écart. En effet seulement 44 % des « plus de 70 ans » possèdent un téléphone portable tandis qu’au moins 14 % des Français ne sont pas à l’aise avec les manipulations comme l’activation du Bluetooth ou l’installation d’une application, pourtant ce sont souvent les populations considérées comme les plus « à risques ».

Les problèmes techniques relevés pourraient, a contrario, mettre en danger les individus trop confiants dans l’application qui ne pourra pas signaler qu’un malade qu’ils n’ont jamais croisé a touché la poignée de porte de leur boutique préférée.

L’installation de StopCovid sur la base du volontariat traduirait le consentement des individus, mais le caractère libre et éclairé de celui-ci n’est pas avéré. En effet la pression sociale et patronale, l’éventuel refus d’accès à certains services, la stigmatisation des « réfractaires » risque d’obliger un grand nombre de personnes à l’installer.

Enfin la solution technologique que l’on vous propose de voter pour mettre fin à la pandémie porte en elle le risque d’une habituation à une surveillance généralisée, banalisée et pérenne. La fin de la pandémie étant tout à fait incertaine, la suppression de l’application, que l’on nous promet à la fin de la crise sanitaire, risque de ne jamais intervenir, d’autant plus qu’elle pourrait bien servir pour prévenir d’autres risques à venir.

Les risques d’atteinte au respect de la vie privée et au secret médical, les risques de surveillance généralisée au regard d’une efficacité tout à fait incertaine conduisent la Ligue des droits de l’Homme (LDH) à vous demander instamment de vous opposer au projet StopCovid. »

Et des associations déclarent : « Il y a des moments où pour défendre nos libertés, notre responsabilité c’est de trancher entre un oui ou un non : il n’y a pas de place pour l’abstention. Pour nous, c’est NON. »

Minga, La Quadrature du Net, la Confédération paysanne, l’Alliance Slow Food des cuisinières et cuisiniers, le Syndicat des Travailleurs et Travailleuses du Jeu Vidéo, Collectif des Livreurs Autonomes de Paris, Collectif des Associations Citoyennes, le Syndicat des Récoltants Professionnels d’Algues de Rive de Bretagne, le syndicat des artisans semenciers, la coopérative les oiseaux de passage, la scop EKITOUR, la coopérative Pointcarré , le syndicat solidaires informatique.

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