Deux décisions de justice : une réjouissante, l’autre attristante

Publié le 18 décembre 2020
Photo GK

Tout d’abord la décision réjouissante : le 10 décembre le tribunal administratif de Marseille a sanctionné le refus opposé à des associations de porter une assistance médicale et juridique aux personnes exilées enfermées illégalement dans le local attenant au poste de la police aux frontières (PAF) de Montgenèvre. Considérant que cet espace ne peut constituer un local de « mise à l’abri », le juge des référés vient s’inscrire dans la lignée de la décision du 30 novembre dernier du tribunal administratif de Nice. Reprenant la décision du Conseil d’Etat du 27 novembre dernier, le tribunal rappelait qu’« un refus d’entrée ne peut être opposé à un étranger qui a pénétré sur le territoire en franchissant une frontière intérieure terrestre ». En confirmant l’illégalité des pratiques de l’administration à la frontière franco-italienne, que les associations ne cessent de dénoncer, cette décision pose les bases d’une reconnaissance de l’illégalité de la privation de liberté des personnes exilées à cette frontière.

Ces récentes décisions permettent d’ouvrir une nouvelle voie à la reconnaissance et à la sanction des violations quotidiennes des droits des personnes exilées à la frontière franco-italienne, les associations appellent désormais à ce qu’elles se traduisent dans les faits. Il faut que cessent, enfin, ces pratiques qui violent les droits et mettent en danger la vie de nombreuses personnes, chaque jour, aux frontières françaises.


La décision attristante, celle de la cour d’appel de Grenoble qui vient de relaxer les trois cadres de « Génération identitaire » dans l’affaire des opérations anti-migrants menées en 2018 dans les Alpes, à la frontière franco-italienne. Vêtus de doudounes bleues ressemblant à celles de gendarmes, les militants de « Génération identitaire » avaient multiplié les démonstrations d’hostilité aux migrants à la frontière franco-italienne : patrouilles de nuit et déploiement d’une chaîne humaine très médiatisée sous la bannière « Defend Europe ».  En première instance ils avaient été condamnés en août 2019 à six mois de prison ferme par le tribunal correctionnel de Gap. Leur organisation avait écopé de 75.000 euros d’amende.

D’après l’AFP, la cour d’appel estime que cette chaîne humaine était une action « purement de propagande politique », « à visée médiatique » et « annoncée comme telle ». Elle n’était donc pas « de nature à créer une confusion dans l’esprit du public avec l’exercice des forces de l’ordre ».

Du coté des plaignants, on se dit « stupéfait ». Et ce, « d’autant plus que certains de nos bénévoles ont été condamnés et d’autres sont poursuivis pour l’aide qu’ils apportent aux exilés », a déclaré à l’AFP Agnès Antoine, vice-présidente de l’association Tous Migrants.

Les avocats de l’association (qui n’avait pu se porter partie civile car n’ayant pas 5 ans d’existence) ont fait part de « leur totale incompréhension face à une telle décision, qui potentialise le risque que des milices viennent imposer leur loi à la frontière en violation des droits fondamentaux des personnes exilées ».

« Il s’agit d’un message de très mauvais augure pour tous ceux qui militent pour les droits fondamentaux, en plus de créer un deux poids deux mesures par rapport à la criminalisation des maraudeurs » (les militants venant à l’aide des plus démunis), écrivent Me William Bourdon et Vincent Brengarth.

Les deux avocats ont rappelé que les sept militants de Briançon condamnés après avoir participé à une manifestation en réaction à l’action de GI, étaient « toujours dans l’attente de leur procès en appel ».

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