Enquête publique sur Métrocâble, la position de l’ADES

Publié le 15 décembre 2023

Le PDU 2030 était une avancée importante pour l’avenir de l’agglomération et de la grande région grenobloise. Malheureusement le SMMAG durant le mandat débuté en 2020 n’a pas réussi à mobiliser des moyens suffisants pour permettre des réalisations contenues dans le PDU et se contente comme seul projet important un câble entre Fontaine et Saint Martin le Vinoux.

Ce projet de câble ne faisait pas partie des grandes priorités du PDU, parmi les actions au sujet des transports collectifs il se trouvait parmi les moins importantes. Dans les fiches actions du PDU, il se trouve parmi les dernières de la liste.  Des critiques importantes de ce projet s’étaient déjà manifestées dans l’enquête publique sur le PDU 2030.

La commission d’enquête du PDU avait émis deux recommandations concernant le projet de câble (recommandations 5 et 8).

Recommandation 5 : « La commission d’enquête souhaite que la problématique d’extension du réseau de tramways soit réétudiée et mise en regard, en termes de montant d’investissements, de nombre d’usagers transportés, et de priorité dans le temps, avec d’autres investissements lourds (métrocâble) sur la période allant jusqu’à 2030. »

Engagement du SMTC en réponse : « La politique du SMTC sur ce sujet est que chaque nouvel investissement lourd soit décidé au regard de l’équilibre entre les sommes investies, le nombre d’usagers transportés et le niveau de priorité par rapport aux objectifs fondateurs du PDU »

Recommandation 8 : « La commission d’enquête souhaite que la question du métrocâble soit ré-analysée, en termes de montant d’investissements, de nombre d’usagers transportés, et de priorité dans le temps, en concertation avec les associations représentatives des usagers, en particulier l’ADTC, LAHGGLO, « le chainon manquant », etc. »

Engagement du SMTC : « Le SMTC prévoit d’actualiser l’étude socio-économique du projet de câble entre Fontaine et Saint-Martin-Le-Vinoux, avec une nouvelle modélisation qui permettra de préciser les estimations de voyageurs. En 2019, le SMTC prévoit également d’approfondir l’articulation entre ce câble et les autres modes de déplacements à l’échelle de la branche nord-ouest de l’agglomération. Ces éléments permettront d’affiner le projet et seront présentés aux associations représentatives d’usagers. Afin d’associer au maximum les associations et le grand public au fil de la construction du projet, le SMTC prévoit la tenue d’une concertation volontaire continue de la définition du programme jusqu’au début des travaux. Il est à noter également qu’une enquête publique aura lieu sur la base de l’avant-projet. »

Dans le PDU 2030 une proposition cohérente indiquait clairement que le câble soit étroitement associé à un bus à haut niveau de service (BHNS), allant de la Presqu’Ile vers le Grésivaudan et les entreprises de microélectronique.

Mais le SMMAG a abandonné ce BHNS jusqu’à la Presqu’ile, ce qui prive le câble d’un grand intérêt.

Le PDU et le PPA3 (Plan de protection de l’atmosphère) recherchent des solutions pouvant faire évoluer fortement le report modal en priorité vers les modes actifs ou les transports en commun au détriment de la voiture. L’étude scientifique MobilAir est convaincante à ce sujet : https://www.cnrs.fr/sites/default/files/press_info/2022-01/CP%20MobilAir_web.pdf

« La mise en œuvre réussie de ces mesures entraînerait des bénéfices sanitaires en cascade, qui dépassent le gain sanitaire directement associé aux particules fines. En effet, elles favorisent l’activité physique, réduisent le bruit dans la ville et les émissions de gaz à effet de serre. Les scénarios avec le plus fort développement des modes actifs (marche et vélo) conduisent alors à un bénéfice net de 8,7 milliards d’euros sur la période 2016-2045, soit un gain annuel de 629 € par habitant de la métropole ».

La mise en œuvre du transport par câble apparait beaucoup moins prioritaire qu’une amélioration des infrastructures cyclables par les nouveaux franchissements du Drac et de l’Isère inscrits au PDU 2030, via l’objectif de l’achèvement du 1er réseau Chronovélo d’ici 2023 et via son doublement entre 2024 et 2030 (comme stipulé dans l’action 7.1 du PDU 2030 approuvé).

Les données sur les trafics présentées dans les documents de l’enquête publique du câble, notamment dans la pièce D traitant de l’évaluation économique démontrent clairement que le câble n’aura qu’une très faible influence sur les parts modales : très peu d’impact sur la part modale de la voiture, par contre un report très massif d’utilisateurs de Transports en Commun sur le câble :

Voir Page 39 de la pièce D : « Le projet en 2025 est estimé à 4600 voyages par jour et 93 % sont des utilisateurs des TC, 2% (92) de la marche à pied, 5% de la voiture, ce qui diminuerait l’utilisation d’environ seulement 150 voitures. ».

En 2035 il y aurait 7700 voyages de personnes provenant toujours en ultra grande majorité (83%) d’utilisateurs des TC, 5% de la marche à pied et du vélo et seulement 8% des voitures (soit seulement 400 voitures qui ne seraient pas utilisées).

Les modes actifs sont de facto peu encouragés par ce mode de transport en commun, car le câble trouve son public majoritairement parmi les habitants déjà utilisateurs de Transports en Commun.

A noter que l’Autorité environnementale a demandé au maitre d’ouvrage SMMAG du câble de reprendre des études sur l’estimation des trafics .. La réponse du SMMAG est vraiment à côté de la plaque :

« Les outils partenariaux de modélisation mis en œuvre pour estimer la fréquentation de la nouvelle ligne sont robustes et utilisés dans l’aire grenobloise depuis de nombreuses années. Ils font l’objet de mises à jour régulières, prenant en compte les évolutions des comportements de mobilité tels qu’ils sont mesurés via les grandes enquêtes mobilité. Cependant, il est aujourd’hui encore difficile d’évaluer et donc de modéliser les éventuels changements de comportement qui auraient suivi la crise sanitaire de Covid-19. Dans ce contexte, le SMMAG travaille avec l’Etat, les autres collectivités locales, le CEREMA et plusieurs laboratoires de recherche pour poursuivre le processus d’amélioration continue de ses outils de modélisation »

Ces informations au sujet du trafic sont pourtant une donnée stratégique. Il faudrait au moins une étude spécifique pour que l’étude d’impact soit complète.

Il apparait clairement que ce projet de câble de par son implantation et les distances parcourues n’a pas vocation à améliorer de manière significative la part modale des modes doux et transports en commun. Pour de si courtes distances, le vélo devient un moyen privilégié de transport, surtout avec le progrès des distances faciles à couvrir au-delà de 5 kms avec un Vélo à Assistance Electrique (que le SMMAG encourage par ailleurs en dehors de Grenoble).

Pour juger de l’intérêt public d’un projet, la théorie du bilan coût/avantage rappelle que le projet doit démontrer un avantage en termes financier, économique mais aussi social et environnemental par rapport à d’autres alternatives.

La question est alors de savoir si d’autres projets, prévus dans le PDU dans le périmètre du SMMAG, ne seraient pas meilleurs que celui proposé à l’enquête publique.

Le SMMAG ne peut pas se contenter d’analyser les deux autres alternatives indiquées dans le dossier d’enquête publique : la première, ne rien faire (!) et la seconde, un BHNS dont une partie de sa ligne qui parcourrait à peu près les lieux desservis par le câble. Ces deux alternatives ne sont pas prévues au PDU, elles ne sont pas d’un intérêt public supérieur à beaucoup d’autres prévues par le PDU. Elles ne sont donc pas à examiner dans le cadre de cette enquête.

Par contre il y a de nombreuses actions prévues dans le PDU pour des transports publics ou pour le développement du vélo qui auraient un impact beaucoup plus important sur la diminution de l’utilisation de la voiture pour un coût d’investissement équivalent à celui du câble

D’abord en développant fortement les pistes cyclables bien sécurisées, ce qui coute beaucoup moins cher en fonctionnement notamment. La montée en puissance de l’utilisation des vélos dans l’agglomération pour les trajets domicile travail (12 % dans l’agglomération mais 22 % à Grenoble désormais) montre son efficacité à bouleverser la part modale des voitures notamment pour des distances plutôt courtes mais même maintenant avec les VAE pour des distances moyennes (5 à 30 kms).

Autre alternative à examiner : la ligne de Bus à haut niveau de service entre Montbonnot et la Presqu’île (action 9.6 du PDU 2030 adopté), soumise à concertation en 2019, projet soutenu par de nombreuses communes et qui vise 15 000 voyages par jour. Solution qui aurait l’excellent avantage de relier la Presqu’Ile scientifique aux entreprises de microélectroniques du Grésivaudan. Avec un gain de report modal indéniable. Qui pourrait être partiellement poursuivie.

Ou de débuter la mise en place de lignes périurbaines rapides vers le grand sud de l’agglomération et Vizille (voir détail des actions 9.2 et 9.6 du PDU 2030 adopté).

En conclusion, l’ADES remet en cause l’utilité publique de ce projet au vu des priorités claires du PDU. Elle demande à la commission d’enquête d’exiger que l’étude des variantes au Métrocâble soient reprises avec d’autres solutions permettant des reports modaux vers les modes doux et les transports en commun beaucoup plus efficaces que ce projet de câble.

Pour accéder au dossier d’enquête et mettre des contributions voir ici.

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