La suppression de la taxe d’habitation a des conséquences sur la construction de logements, notamment sociaux

Publié le 15 octobre 2021

On pouvait croire en la neutralité de la suppression de la Taxe d’Habitation sur les politiques publiques locales, que c’était juste une mesure sociale pour diminuer le poids de l’impôt local pour les habitants. Mais il apparait, grâce à une étude que cette suppression a de véritables conséquences sur la construction de logements. Pour simplifier, les nouveaux logements apportent moins de ressources fiscales qu’avant la réforme, alors que les nouvelles surfaces d’activité génèrent un rendement fiscal supérieur pour les communes. Donc il y a une concurrence entre logements et locaux d’activités en faveur des seconds.

Le cabinet de consultants « FCL Gérer la cité » a rendu un travail pour la Gazette des communes sur les conséquences de la réforme de la taxe d’habitation sur la construction de logements.

Voici des extraits de l’article de la Gazette des communes :

« … Les modalités de remplacement de la taxe d’habitation assurent bien une neutralité sur le stock existant de ressources (à quelques exceptions près). En revanche, la dynamique est modifiée : en synthèse, sur la très grande majorité des territoires, les nouveaux logements apportent moins de ressources fiscales qu’avant la réforme, tandis que les nouvelles surfaces d’activité génèrent un rendement fiscal supérieur pour les communes.

Dans le cadre de la contribution de FCL-Gérer la Cité à la Commission Rebsamen, nous avons ainsi montré que la dynamique de produit fiscal est pour partie déplacée des locaux d’habitation vers les locaux professionnels, ce qui n’est évidemment pas incitatif à la construction de logements…

Ressources de substitution : une assiette et une dynamique différentes de la taxe d’habitation

La taxe d’habitation pour les résidences principales est remplacée :

  • Pour les communes, par le transfert de l’ex taux départemental de taxe foncière sur les propriétés bâties, assorti d’un mécanisme de coefficient correcteur permettant de tenir compte du fait que cette recette n’est pas équivalente à la TH supprimée ;
  • Pour les EPCI, par une fraction de taxe sur la valeur ajoutée (TVA).

Sur le stock, ces mécanismes sont neutres à l’exception des collectivités qui avaient récemment augmenté leur taux de TH (les mécanismes de compensation sont calculés au taux de 2017) et des communes dont le gain est inférieur à 10 000 euros (il n’est alors pas corrigé).

En revanche, la transformation de l’assiette des ressources modifie en profondeur la dynamique associée :

La TVA perçue par les EPCI évoluera comme la TVA perçue au niveau national. Il n’y a plus aucun lien entre cette recette de TVA et l’évolution du parc de logements sur le territoire.

Pour les communes, les nombreuses différentes d’assiette entre la taxe foncière sur les propriétés bâties et la taxe d’habitation expliquent cette modification de la dynamique :

La Taxe d’habitation est/était due par l’occupant d’un logement au 1er janvier de l’année. Il existait des mécanismes d’exonérations, partiellement compensés aux collectivités, mais la majeure partie des réductions d’imposition prenaient la forme de dégrèvements pris en charge par l’Etat. La très grande majorité des logements donnaient ainsi lieu à perception de taxe d’habitation. En matière de taxe foncière, la principale réduction est constituée par les exonérations de longue durée accordées aux logements sociaux, dont les conditions dépendent des dispositifs de financement aidé dont ils ont fait l’objet. Le taux de compensation de ces exonérations a fortement diminué au fil des années, pour atteindre moins de 7% aujourd’hui.

Ainsi, un nouveau logement social n’amène quasiment plus aucun produit fiscal pour une commune, alors qu’il générait de la taxe d’habitation dans la majorité des cas.

Sous condition, certains logements locatifs intermédiaires bénéficient également d’une exonération de taxe foncière.

La réforme n’est pas neutre non plus s’agissant des recettes associées à un nouveau logement libre. Moins intuitive, cette différence provient du fait que la ressource de remplacement est basée sur une assiette mixte habitations/locaux professionnels et non plus habitations uniquement. La taxe d’habitation est ainsi remplacée par une ressource mixte, et le produit moyen par logement est mécaniquement diminué…

Nous avons ainsi simulé les recettes fiscales induites par un nouveau logement social, un nouveau logement libre, et un programme de 1 000 logements (comportant par hypothèse 25% de logements sociaux) avant et après la suppression de la taxe d’habitation, sur la quasi-intégralité des communes françaises (34 843 communes intégrées à l’échantillon)…

A titre d’illustration, après suppression de la TH, les recettes fiscales induites par le programme de 1000 logements sont réduites de 20% ou plus pour environ un tiers environ des communes, et de 10% ou plus pour environ 85% des communes. Nous avons également cherché à mesurer dans quelle mesure le rendement fiscal majoré des locaux professionnels compensait cette perte de dynamique liée au logement. Sans même entrer dans des considérations sur la pertinence programmatique, il en ressort que les surfaces de locaux professionnels nécessaires pour rééquilibrer la perte de dynamique en matière de logement sont très importantes (supérieurs à 10 000 m² de bureaux pour 96% des communes)… »

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