Précisions sur les droits des habitants concernant la participation à la décision publique

Publié le 19 novembre 2021

Le CLUQ a rédigé une déclaration concernant « Les droits des habitants à participer à la décision publique ». Ce texte veut définir en droit, les règles de fonctionnement entre les assemblées élues et les habitants. Malheureusement cette déclaration n’a pas d’utilité pour une application réelle puisqu’elle est en dehors du droit actuel. Il en aurait été autrement si le CLUQ, désireux de faire évoluer le droit de participation des habitants au processus des décisions publiques locales, s’était adressé aux parlementaires pour leurs demander une évolution des règles de droit qui sont effectivement très limitées actuellement.

Ce texte aurait pu être d’application réelle s’il s’était contenté d’évoquer des propositions pour participer à la préparation à la décision publique et non participer directement à la prise de décision qui est réservée par la Constitution aux assemblées élues (article 72 de la Constitution). La démocratie directe ne fait pas partie de notre droit.

Nous sommes dans un Etat de droit dont les règles sont déterminées par la Constitution, les lois, les règlements et la jurisprudence.

De plus il n’existe pas de mandat impératif (anticonstitutionnel) qui permettrait aux électeurs ou aux habitants d’imposer une décision à l’assemblée élue, même par une pétition ou une votation massive. Il n’y a pas de Référendum d’Initiative Citoyenne, le seul Référendum d’Initiative Partagé (RIP) est initié par des parlementaires (article 11 de la Constitution).

La municipalité de Grenoble a tenté de faire évoluer le droit dans le mandat précédent, mais le préfet a veillé au grain, il est intervenu pour faire annuler par la justice administrative le système de votation citoyenne mis en place. Pour maintenir une relation ouverte avec les habitants concernant les politiques publiques locales, la nouvelle majorité a mis en place un système d’interpellation citoyenne.

L’article 72-1 de la Constitution ouvrait quelques perspectives d’interpellation citoyenne pour les électeurs : « La loi fixe les conditions dans lesquelles les électeurs de chaque collectivité territoriale peuvent, par l’exercice du droit de pétition, demander l’inscription à l’ordre du jour de l’assemblée délibérante de cette collectivité d’une question relevant de sa compétence. » Malheureusement la loi n’a jamais rien fixé comme conditions d’application de cet article…

Dans le code général des collectivités territoriales (CGCT) il y a l’article L 2141-1 qui peut faire croire à de vastes possibilités, mais malheureusement dans la réalité il va se limiter au droit à l’information et à l’accès aux documents, car comme le dit la jurisprudence, il est de portée générale et les modalités de consultation des habitants d’une commune sur les affaires relevant de la compétence de la commune sont réservées aux électeurs inscrits sur les listes électorales et les différentes possibilités, consultation ou référendum local sont définies par le maire ou l’assemblée élue.

Il n’y a pas de droit des habitants à participer à la décision publique.

Le seul point positif du droit actuel qui concerne les habitants et non seulement les électeurs a été précisé par une ordonnance d’octobre 2015 qui autorise les collectivités à pouvoir associer le public à la conception d’une réforme ou à l’élaboration d’un projet ou d’un acte, en dehors des cas régit par les lois et les règlements.

C’est l’article L. 131-1 du code des relations entre le public et l’administration :

 » Lorsque l’administration décide, en dehors des cas régis par des dispositions législatives ou réglementaires, d’associer le public à la conception d’une réforme ou à l’élaboration d’un projet ou d’un acte, elle rend publiques les modalités de cette procédure, met à disposition des personnes concernées les informations utiles, leur assure un délai raisonnable pour y participer et veille à ce que les résultats ou les suites envisagées soient, au moment approprié, rendus publics. »

Le Conseil d’Etat du 19 juillet 2017, n° 403928, a précisé les modalités d’une telle association à la préparation d’une décision publique :

« Il incombe en particulier à l’autorité administrative qui organise une consultation dans les cas qui relèvent de l’article L. 131-1 du code des relations du public et de l’administration d’en déterminer les règles d’organisation conformément aux dispositions de cet article et dans le respect des principes d’égalité et d’impartialité, dont il découle que la consultation doit être sincère. L’autorité administrative doit notamment mettre à disposition des personnes concernées une information claire et suffisante sur l’objet de la consultation et ses modalités afin de leur permettre de donner utilement leur opinion, leur laisser un délai raisonnable pour y participer et veiller à ce que les résultats ou les suites envisagées soient, au moment approprié, rendus publics. La régularité de la consultation implique également, d’une part, que la définition du périmètre du public consulté soit pertinente au regard de son objet, et, d’autre part, qu’afin d’assurer sa sincérité, l’autorité administrative prenne, en fonction de cet objet et du périmètre du public consulté, toute mesure relative à son organisation de nature à empêcher que son résultat soit vicié par des avis multiples émanant d’une même personne ou par des avis émis par des personnes extérieures au périmètre délimité. Il incombe enfin à l’autorité administrative de veiller au bon déroulement de la consultation dans le respect des modalités qu’elle a elle-même fixées. »

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