Le juge administratif des référés suspend une phrase du règlement des piscines de Grenoble

Publié le 27 mai 2022

Le 23 mai 2022, le Préfet de l’Isère dépose au tribunal administratif de Grenoble un déféré laïcité demandant la suspension de l’exécution de la délibération du 16 mai 2022 adoptant le nouveau règlement intérieur des piscines grenobloises, estimant que ce règlement autorise le port du burkini. Il s’appuie sur l’article L.2131-6 du CGCT : « Lorsque l’acte attaqué est de nature à compromettre l’exercice d’une liberté publique ou individuelle, ou à porter gravement atteinte aux principes de laïcité et de neutralité des services publics, le président du tribunal administratif ou le magistrat délégué à cet effet en prononce la suspension dans les quarante-huit heures. »

Le 25 mai 2022, le juge administratif des référés (en formation à 3) suspend la phrase du règlement qui autorisait des tenues de bain non près du corps en contradiction avec la règle générale d’obligation de tenues près du corps :

« En permettant aux usagers du service public communal des piscines de Grenoble de porter des tenues « non près du corps », sous la seule condition qu’elles soient moins longues que la mi-cuisse – comme c’est le cas notamment du vêtement de baignade appelé burkini-, c’est à dire en dérogeant à la règle générale d’obligation de porter des tenues ajustées près du corps pour permettre à certains usagers de s’affranchir de cette règle dans un but religieux, ainsi qu’il est d’ailleurs reconnu dans les écritures de la commune, les auteurs de la délibération litigieuse ont gravement porté atteinte aux principe de neutralité du service public. »

Le juge administratif décide : « L’exécution de l’article 10 précité du règlement des piscines de Grenoble dans sa rédaction issue de la délibération du conseil municipal du 16 mai 2022 est suspendue en tant qu’elle autorise l’usage de tenues de bains non près du corps moins longues que la mi-cuisse. »

L’autre obligation suivant de l’article 10 du règlement n’est pas suspendue :

« Les tenues de bain doivent être faites d’un tissu spécifiquement conçu pour la baignade, ajustées près du corps, et ne doivent pas avoir été portées avant l’accès à la piscine. »

C’est ce qu’avait considéré l’ADES :

L’ADES avait attiré l’attention sur cette phrase du règlement car elle créait une incohérence dans le règlement qui le rendait irrégulier mettant en cause l’hygiène et la sécurité et non parce qu’elle autorisait une tenue à caractère religieux. Selon l’ordonnance du tribunal, la commune aurait justifié dans son mémoire de défense que l’autorisation de tenues non près du corps l’était pour le « burkini », donc dans un but religieux.

La Ville a décidé de faire appel au Conseil d’Etat, elle doit le faire dans les 15 jours. C’est une nécessité, car ce déféré laïcité est « une première ». Par conséquent, il s’avère indispensable d’obtenir une jurisprudence de la plus haute juridiction administrative sur cette question. Le Conseil d’Etat aura 48 heures pour décider après réception du mémoire de la ville.

En attendant la décision du juge des référés du Conseil d’Etat, le nouveau règlement intérieur s’appliquerait sans la phrase incriminée, donc dans sa quasi-totalité :

« Article 10 : Règles d’hygiène et de sécurité

Pour des raisons d’hygiène et de sécurité, l’accès aux bassins se fait exclusivement dans une tenue de bain correspondant aux obligations suivantes :

  • Le port du bonnet de bain est obligatoire dans les piscines couvertes.
  • Les tenues de bain doivent être faites d’un tissu spécifiquement conçu pour la baignade, ajustées près du corps, et ne doivent pas avoir été portées avant l’accès à la piscine.
  • Les tenues non prévues pour un strict usage de baignade (short, bermuda, sous-vêtements, etc.), et les maillots de bain-shorts sont interdits,
  • Le tee-shirt et le paréo sont admis en-dehors des bassins et sur les espaces extérieurs. La nudité est interdite,
  • Les enfants en bas âge doivent porter des couches de bain spécifiques.

L’ensemble de ces éléments est repris dans les pictogrammes affichés dans les équipements (cf art. 1er). (…) »

Et avec une correction dans les pictogrammes comme ci-dessous. Les tenues intégrales près du corps sont autorisées.

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