Défense des ressources en eau de la métropole

Publié le 29 mars 2024

Deux nappes d’eau souterraines concernent Grenoble et les communes de la Métro (voir la carte ci-dessous).

La première (numérotée FRDG371) comprend la nappe alimentant les puits de captage d’eau potable de Rochefort, protégée par la Déclaration d’utilité publique de 1967 qui est en cours de renouvellement ; elle est alimentée par le Drac. Cette nappe a une eau de très bonne qualité qui va être pompée par les puits de Rochefort et alimenter une grande partie des usagers de l’eau potable de la Métro, avec les puits de Jouchy-Prégrivel alimentés par la Romanche en amont des entreprises de la chimie. Mais on a découvert récemment, malgré ses qualités minérales et sa pureté bactériologique qu’elle est malheureusement atteinte par des pollutions – dans des pourcentages décrits comme soutenables, mais qu’il convient absolument de stopper – provenant des rejets des industries chimiques dans la Romanche en face des champs de captage de l’eau potable.

La deuxième (numérotée FRDG372), alimentée par la Romanche et le Drac, traverse le sud grenoblois et toute la ville de Grenoble. Elle est de très mauvaise qualité à cause des rejets depuis de très longues années par les entreprises de la chimie du sud grenoblois. Elle ne peut, ne doit pas être utilisée pour arroser les jardins, ni être utilisée pour des brumisateurs.

Depuis que le lieu précis des rejets dans la Romanche de la plateforme chimique du sud grenoblois a été précisé, exactement en face des champs de captage de Rochefort et que des études démontrent que la pollution atteint certains des puits de captage de Rochefort, la mobilisation s’est développée pour défendre ces ressources en eau potable naturellement pure, aujourd’hui menacées. Ces rejets chimiques sont formellement interdits par la DUP de 1967, mais malheureusement toujours autorisés par des arrêtés du préfet de l’Isère.

Prenant connaissance de ces nouvelles informations sur les pollutions de la nappe FRDG371, Anne-Sophie Olmos, Vice-présidente de la Métro en charge de l’eau a effectué début 2023, deux signalements au procureur de la République, le parquet de Grenoble a alors ouvert deux enquêtes préliminaires, sur les rejets d’ARKEMA et les carriers dans le lit du Drac. 

Auparavant Raymond Avrillier membre du conseil d’exploitation a déposé des recours au tribunal administratif pour stopper cette situation tout à fait anormale.

La Ville de Grenoble engage trois procédures judiciaires pour dénoncer la contamination des eaux grenobloises et faire appliquer le principe pollueur/payeur. A l’occasion de la Journée mondiale de l’eau, ces recours ont été déposés devant les tribunaux.

La contamination des cours d’eau et de la nappe va se poursuivre et s’aggraver si aucune mesure n’est prise pour endiguer les pratiques irrégulières, contraires à l’intérêt général et nocives pour la santé et la salubrité publiques dont la Ville de Grenoble est garante. L’eau consommée doit être saine, sans risque sanitaire, pour l’ensemble des usager-es. La ville rappelle que c’est aux pollueurs de payer et non aux collectivités et aux habitants.

Dans un communiqué du 22 mars 2024, la Ville de Grenoble précise les actions menées :

« La Ville lance une procédure administrative contre la préfecture de l’Isère (arrêtés ICPE ARKEMA FRANCE). La Ville de Grenoble demande au préfet de l’Isère de retirer toutes les autorisations données à ARKEMA FRANCE pour rejeter des effluents pollués dans La Romanche. Ces arrêtés ont été pris entre 1976 et 2023 alors qu’un précédent arrêté préfectoral de 1967 protège les champs de captage de Rochefort. La Ville saisira le Tribunal administratif de Grenoble si le préfet de l’Isère ne fait pas droit à cette demande.

La Ville s’est constituée partie civile dans deux informations judiciaires ouvertes

Une enquête a été ouverte par le Procureur le 6 février 2023 visant la société Arkema France qui exploite une installation classée pour la protection de l’environnement (ICPE) sur la plateforme chimique de Jarrie, suite aux signalements effectués par Anne-Sophie Olmos, Vice-présidente au cycle de l’eau à

Grenoble Alpes Métropole, en janvier 2023. La Ville a pris connaissance des rejets quotidiens d’Arkema de plusieurs dizaines de milliers de m3 d’effluents pollués dans la Romanche, laquelle rejoint le Drac…

Le 28 février 2024, la Ville a donc pris un arrêté pour se constituer partie civile dans le cadre des deux affaires, afin d’avoir accès et de pouvoir soutenir les enquêtes :

  • ARKEMA FRANCE (n° parquet : 23017000230) : rejet de polluants irréguliers
  • SMAG et CARRON (n° parquet : 23017000238) : activités et présence irrégulières dans le périmètre de protection immédiat des champs de captage de Rochefort…

La Ville dépose une plainte contre X au regard de la pollution des deux nappes…»

Autre information importante, le conseil de métropole du 29 mars 2024 va proposer d’ajouter aux statuts de la métropole une prise de compétence supplémentaire pour lui permettre de surveiller la qualité des eaux superficielles et souterraines de son territoire et de les protéger :

« Compte tenu de l’importance des enjeux de gestion des eaux souterraines de la Métropole, à savoir le maintien d’une eau en quantité et qualité suffisantes ainsi que la mise en œuvre de toutes les actions permettant de garantir la qualité et limiter tout risque de transfert de polluants sur les nappes exploitées pour l’eau potable, il est proposé de transférer les compétences suivantes, issues de l’article L.211-7 du code de l’environnement :

La protection et la conservation des eaux superficielles et souterraines (7°) à l’exclusion du traitement des pollutions, notamment celles relevant du principe pollueur/payeur, et de toute forme de régulation des niveaux piézométriques des nappes ;

  • La mise en place et l’exploitation de dispositifs de surveillance de la ressource en eau et des milieux aquatiques (11°) ;
  • L’animation et la concertation dans les domaines de la prévention du risque d’inondation ainsi que de la gestion et de la protection de la ressource en eau et des milieux aquatiques dans un sous-bassin ou un groupement de sous-bassins, ou dans un système aquifère, correspondant à une unité hydrographique (12°)…

Le déploiement d’actions par la Métropole suite à cette modification statutaire nécessitera une mobilisation forte des industriels du territoire et des services de l’Etat (DREAL, DDT), en charge de l’animation du Programme d’Action Opérationnel territorialisé (PAOT) pour la nappe FRDG372. L’engagement de la Métropole sur ces actions, qui sont d’intérêt public, mobilisera des financements qui pourront être apportés par les acteurs publics (Agence de l’Eau notamment) et privés, et son ampleur sera conditionnée à l’engagement des acteurs concernés. Les industriels du territoire seront ainsi sollicités pour financer les actions qui pourraient être déployées par la Métropole au titre de ce transfert de compétence, conformément au principe « pollueur-payeur », principe juridique et économique régi par l’article L.110-1 du code de l’environnement…»

Les conseils municipaux des 49 communes devront donner, sous trois mois, leurs avis sur ce changement de statuts.

A noter que la métropole de Lyon a aussi saisi la justice le 19 mars pour faire appliquer le principe « pollueur-payeur » au français Arkema et au japonais Daikin dans un dossier de pollution aux PFAS qui imposent de coûteux travaux sur ses réseaux d’eau potable. Les deux sites industriels se trouvent sur les rives du Rhône, dans la vallée de la Chimie, en aval de Lyon.

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