Le billet de Philippe Meirieu le 16 octobre 2023 dans le Café pédagogique, comme réaction à cet assassinat suffit :
« Aucune parole ne pouvait être à la hauteur de l’événement et il aurait mieux valu, sans doute, s’en tenir au silence. Un silence collectif et solidaire. Un silence assourdissant pour enjoindre nos concitoyens de mettre un terme aux lieux communs et aux invectives sur les réseaux sociaux, aux commentaires bavards et filandreux des chaînes d’information en continu, aux pseudo-analyses et aux interprétations prématurées des journalistes pressés, aux récupérations honteuses de tous ceux et toutes celles qui, la veille, affichaient, jusque dans les salons de l’Assemblée nationale, leur mépris pour les professeurs et qui, tout à coup, se mirent à multiplier les déclarations d’amour à leur égard. Il aurait fallu de la dignité.
Il aurait aussi fallu penser à celles et ceux qui, aujourd’hui et demain, vont se retrouver devant des élèves, la tristesse au cœur et la colère au ventre, et qui vont devoir – parce que c’est là ce qui donne sens à leur métier – « faire l’École » pour pouvoir « faire la classe » : créer, envers et contre tout, cet espace-temps particulier où l’on s’efforce de s’approcher ensemble, le plus sereinement possible, de la précision, de la justesse et de la vérité. Il aurait fallu leur dire que l’on savait bien que c’était là l’essentiel, la chose la plus précieuse et la plus indispensable pour notre démocratie et notre avenir commun. Il aurait fallu reconnaître que l’on a toujours tort de réduire le travail des professeurs à un ensemble de services dont les parents seraient les clients. Et qu’au-delà de l’indispensable reconnaissance financière, les professeurs ont infiniment besoin d’une reconnaissance sociale et symbolique.
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