Squat Jean Macé, la Ville en appelle à la justice administrative

Publié le 9 juillet 2021

Alors que la Ville, soutenue par la Métro, avait proposé depuis de longues semaines à la préfecture des locaux pour des hébergements d’urgence pour reloger les personnes qui squattent des bâtiments dans le quartier Jean Macé, dans des situations inadmissibles du point de vue de l’hygiène, la salubrité et la sécurité. Pour la Ville, il faut garantir la mise à l’abri des personnes dont la vulnérabilité n’est pas à démontrer.

Mais la préfecture ne bouge pas.

La Ville de Grenoble a donc décidé d’en appeler à la justice en déposant un référé pour mesures utiles au tribunal administratif de Grenoble pour faire bouger la préfecture, estimant qu’il y a urgence.

L’audience aura lieu le 13 juillet 2021.

Selon l’article L521-3 du code de justice administrative : « En cas d’urgence et sur simple requête qui sera recevable même en l’absence de décision administrative préalable, le juge des référés peut ordonner toutes autres mesures utiles sans faire obstacle à l’exécution d’aucune décision administrative. »

Il faut rappeler le caractère inconditionnel de l’hébergement d’urgence, prévu à l’article L 345-2-2 du Code de l’action sociale et des familles. « Toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique ou sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d’hébergement d’urgence »

Ceci a été rappelé par le juge des référés du Conseil d’État le 10 février 2012 (n° 356456) :

« Considérant qu’il appartient aux autorités de l’Etat de mettre en œuvre le droit à l’hébergement d’urgence reconnu par la loi à toute personne sans abri qui se trouve en situation de détresse médicale, psychique et sociale ; qu’une carence caractérisée dans l’accomplissement de cette tâche peut, contrairement à ce qu’a estimé le juge des référés de première instance, faire apparaître, pour l’application de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale lorsqu’elle entraîne des conséquences graves pour la personne intéressée ; qu’il incombe au juge des référés d’apprécier dans chaque cas les diligences accomplies par l’administration en tenant compte des moyens dont elle dispose ainsi que de l’âge, de l’état de la santé et de la situation de famille de la personne intéressée »

Voici le communiqué de la Ville de Grenoble du 4 juillet 2021 :

« Bidonville Jean Macé – Expulsion et droits des personnes, la Ville de Grenoble saisit le Tribunal administratif d’un référé pour mesures utiles

La situation des personnes vivant dans le bidonville de Jean Macé n’a que trop duré. Indigne pour la centaine de personnes occupantes, dont une large part d’enfants, comme pour les riverain-es. Le propriétaire privé du tènement a demandé à la Préfecture l’expulsion.

Cette situation a fait l’objet de nombreux échanges entre les associations (Ecole Ici et Maintenant, Médecins du Monde, Fondation Abbé Pierre, Fédération des acteurs de la Solidarité), la Ville de Grenoble, Grenoble Alpes Métropole et les services de l’État depuis mars dernier. Malgré cette coopération, la Ville de Grenoble considère que l’absence de propositions d’hébergement d’urgence aux familles génère deux risques majeurs. Pour les familles, le risque d’accroître encore leur vulnérabilité. Pour le territoire, un risque de troubles à l’ordre public que créerait un déplacement plutôt que la résorption du bidonville.

En raison du probable éparpillement des familles, laissées sans solution, de nouveaux bidonvilles ou squats sont susceptibles de voir le jour, renouvelant ainsi une situation existante et compliquant le travail d’accompagnement social effectué par les collectivités et les associations. C’est la raison pour laquelle la Ville de Grenoble a proposé la mise à disposition gracieuse d’un bâtiment à l’Etat afin qu’il puisse garantir sans attendre la mise à l’abri des personnes.

Suite au refus de la Préfecture d’utiliser le bâtiment proposé par la Ville et en raison de différences d’appréciation quant au caractère inconditionnel de l’hébergement d’urgence des personnes, la Ville de Grenoble a saisi le 28 juin 2021 le tribunal administratif en référé afin que des mesures utiles soient prononcées en urgence. Le tribunal administratif vient d’informer les parties qu’une audience est prévue le 13 juillet prochain.

Yann Mongaburu, conseiller municipal délégué à l’urbanisme transitoire, déclare : « Une expulsion s’accompagne de droits : ceux du propriétaire de jouir de son bien évidemment et ceux des personnes sans abri tout autant. Les occupant-es du bidonville Jean Macé, dont la vulnérabilité n’est pas à démontrer, ont le droit à la dignité et au respect de leurs droits fondamentaux, au premier rang desquels leur droit à l’hébergement. Dans l’intérêt de tous les habitants et habitantes de Grenoble et parce que l’inaction de l’Etat n’a que trop duré, nous mobilisons les moyens juridiques à notre disposition pour garantir la protection des plus vulnérables et arrêter le jeu cynique de la patate chaude ».

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